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Gwénolé Gahinet : “Nous essayons de vendre le projet de mes rêves”

Vainqueur de la Mini-Transat en 2011, de la Transat AG2R en 2014 avec Paul Meilhat, premier bizuth de la Solitaire du Figaro cette même année puis 5e au général l’année suivante avant de décrocher le Trophée Jules-Verne sur Idec Sport début 2017 puis de prendre la deuxième place en Imoca de la Transat Jacques Vabre en novembre, encore avec Paul Meilhat, Gwénolé Gahinet a connu une trajectoire ascendante depuis ses débuts au large. C’est désormais le Vendée Globe que vise cet ingénieur de formation – passé notamment par le cabinet VPLP – avec un projet ambitieux de construction de bateau. Il s’en ouvre à Tip & Shaft.

Mini, Figaro, Imoca, maxi-catamaran, en sept ans, tu as connu un apprentissage accéléré de la course au large, comment expliques-tu ce parcours ?
Lorsque je me suis lancé en Mini, je n’avais vraiment aucune idée de ce qui allait se passer derrière. J’avais mis toute mon énergie dans ce premier projet, comme si je n’avais qu’un an pour faire de la course au large. J’ai toujours essayé de garder cet état d’esprit de me donner à fond avec une méthode un peu scientifiqueet c’est vrai que les choses se sont bien enchaînées.

Tu as navigué l’année dernière en Imoca avec Paul Meilhat, qu’as-tu appris de cette expérience ?
C’était hyper intéressant de naviguer avec Paul qui commence à avoir une bonne expérience de l’Imoca sur un bateau en outre très bien rodé et fiabilisé. Ce que j’ai apprécié, c’est qu’à côté du gros côté sportif, il y avait aussi un aspect technique important pour améliorer les performances du bateau avec une équipe compétente autour du projet.

Vous aviez notamment testé un foil sur SMA, une solution qui n’a pas été retenue, pourquoi ?
C’était un foil conçu très tôt, au moment où les premiers foilers étaient en construction, qui devait être installé pour le Vendée Globe 2016, ce qui n’a pas été le cas faute de temps [SMA avait été fortement endommagé après l’hélitreuillage de Paul Meilhat lors de la Transat BtoB fin 2015, ce qui avait nécessité des travaux importants, NDLR]. Entre-temps, il y avait eu tellement d’évolution sur les foils que cette première ébauche était déjà un peu obsolète, il y avait de la traînée dans beaucoup de conditions pas suffisamment compensée par le bonus lié au foil, la décision a donc été assez simple à prendre. Malgré cela, sans foils, on s’en est pas mal sortis sur la Transat Jacques-Vabre, nous avons réussi à tenir la cadence notamment grâce à nos choix de voile assez différents des autres, avec un gennak de capelage qui nous a bien sauvés lorsque les conditions étaient plus favorables aux foilers. Maintenant, je pense que c’était la dernière transat où il pouvait y avoir l’opportunité de gagner pour un bateau à dérives. Entre la jauge qui évolue avec un nouveau réglage de rake sur les foils et l’arrivée des nouveaux bateaux qui vont franchir une marche importante, c’est vraiment la fin des espoirs pour les dérives !

Parlons maintenant de ton avenir, quels sont tes projets ?
Je vais continuer à naviguer cette année à bord d’Idec Sport sur la Nice UltiMed et sur SMA, lors des Monaco Globe Series et de la Giraglia. Sinon, j’avance à fond sur mon projet de Vendée Globe 2020. Pour ça, je travaille avec Antoine Mermod qui serait team-manager du projet, nous essayons de vendre le projet de mes rêves, c’est-à-dire la construction d’un bateau neuf pour participer à la Jacques-Vabre en 2019, au Vendée Globe puis à la Route du Rhum 2022. C’est une stratégie ambitieuse, sachant que pour lancer un bateau neuf, la dead-line sera la fin de l’été, ça se joue dans les mois qui viennent. Après, si le temps passe et que nous ne trouvons pas le budget, je réfléchis forcément à des plans B. Et j’ai vraiment envie de faire la Barcelona World Race, ça me permettrait de faire un bon repérage en vue du Vendée Globe. J’en ai discuté avec Boris Herrmann qui cherche un co-skipper, mais il faut pour cela que je vienne avec une partie du budget.

Tu parles d’un éventuel nouveau bateau, as-tu déjà une idée du ou des architectes avec qui tu voudrais travailler ?
C’est difficile de s’avancer tant qu’on n’a ni budget ni timing, mais si ça devait partir aujourd’hui, on s’orienterait plus vers Guillaume Verdier et son équipe qui ont une belle avance par rapport au travail qu’ils sont en train de faire sur la Volvo Ocean Race. Ils ont eu d’énormes moyens pour travailler sur l’Imoca Volvo, à peu près quatre fois plus que ceux qu’ils auraient eus sur un projet Imoca unique, ce qui leur a permis de développer des outils et d’aller vraiment loin dans les études. Par exemple, ils ont un simulateur de navigation qu’ils avaient développé sur la Coupe de l’America avec les Néo-Zélandais et qui devient accessible en Imoca : c’est comme un jeu vidéo qui permet de tester les designs, les réglages, donc de pousser la boucle de réflexion assez loin. Après, au niveau des foils, ils ont aussi une super expérience avec la Coupe de l’America. C’est le gros dossier, parce que la nouvelle génération de foilers va permettre de franchir un pas important, ça peut être 10-15% de performances en plus à certaines allures. Donc, ce qu’on a vu nous a vraiment semblé intéressant, mais je n’oublie pas non plus l’offre de VPLP qui est aussi attrayante.

Tu n’es pas le seul à chercher un budget pour un projet ambitieux en vue du Vendée Globe, quels atouts mets-tu en avant pour convaincre d’éventuels partenaires ?
J’essaie de mettre en avant mon côté ingénieur. Je veux partir sur un projet ambitieux et gagnant, mais aussi technologique, avec une prise en compte importante de l’impact sur l’environnement. J’ai un ami d’école d’ingénieur avec lequel j’ai déjà commencé à travailler, Corentin de Chatelperron, qui a fait un tour du monde pour promouvoir les low-techs sur un catamaran et qui contribué au projet de recherche Low-tech Lab. On se rend compte que sur des Imoca performants, il y a beaucoup d’innovations qui sont très simples à mettre en oeuvre et ressemblent à des low-techs, j’ai envie de développer cet aspect-là. C’est assez excitant de se dire qu’on peut faire un projet sans faire de compromis sur la performance tout en intégrant des aspects environnementaux.

Tu as un profil d’ingénieur devenu coureur assez similaire à celui de François Gabart, que penses-tu de son parcours ?
Quand je vois son dernier exploit et que je le compare avec ce qu’on a fait sur Idec, je me dis qu’il a tout bon sur toute la ligne. Sa gestion d’équipe semble idéale, avec des compétences et une super ambiance, j’ai pu voir ça un peu de l’intérieur l’année dernière en passant une fois ou deux dans leurs locaux à Port-la-Forêt, ça donne envie de faire des projets de cette qualité.

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