470

Matisse Pacaud/Lucie de Gennes, nouvelles têtes d’affiche du 470 Français

Le championnat d’Europe de 470 débute lundi 12 mai à Split, prélude au grand rendez-vous de la saison, les Mondiaux de Gdynia (Pologne, 6-14 juin). L’occasion pour Tip & Shaft de présenter le nouveau duo français n°1 de la série, composé de Matisse Pacaud et Lucie de Gennes, sur lequel la FFVoile fonde de gros espoirs en vue des JO 2028.

A priori, rien ne prédestinait Matisse Pacaud et Lucie de Gennes, 23 ans tous les deux, à naviguer et collectionner les titres ensemble. Le premier, vrai mordu de voile apparu “très vite dans les radars de la Fédération“, selon Loïc Billon, nouveau manager de l’équipe de France, a suivi un cursus assez classique. Après huit ans d’Optimist et quelques années de Laser, il décide en 2019, sitôt son Bac en poche, de se lancer dans la voie olympique“Comme ce n’était pas possible en Laser à cause de mon gabarit (1,71 m), j’ai choisi de partir en 470 au pôle France de Marseille”, nous raconte depuis Split le membre du Yacht Club de Cannes.

Le 470 devenant mixte en vue des JO de Paris, il lui faut trouver une équipière et c’est par un entraîneur commun, Jean-Philippe Coin, alias « Bilou », qu’il rencontre Lucie de Gennes. Cette dernière, qui a débuté la voile plus tard (13 ans) et sur le lac Léman, où réside sa famille, pratique alors elle aussi le Laser, “mais plus en loisir”, explique-t-elle, se projetant davantage sur ses études que vers la compétition. Le projet que lui présente le Cannois la convainc de se lancer dans l’aventure, reste à se familiariser avec un dériveur dont elle ignore tout à l’époque.

“Avec Matisse, on a commencé par apprendre à mieux se connaître et on s’est vite très bien entendus, poursuit celle qui est aujourd’hui étudiante à l’EM Lyon après être passée par HEC-Lausanne et Paris-Dauphine. Avec « Bilou », ils ont été très patients et ont pris le temps de bien me former, ce qui nous a permis de juste travailler la technique et d’apprendre à maîtriser le support, sans la pression de la compétition. On a passé beaucoup d’heures sur l’eau, ça a été un long cheminement.”

Des débuts fracassants

Le Covid mettant un terme provisoire aux compétitions, le duo se lance réellement en 2021, avec à la clé, d’entrée, une retentissante troisième place au championnat du monde jeunes de 470 en Pologne ! Un résultat qui surprend leur entraîneur d’alors – il est désormais coach de l’équipe de France de 470 -, Philippe Boudgourd : “En novembre 2020, je ne les avais pas retenus sur un stage parce que je trouvais que l’organisation de leur équipage n’était pas encore opérationnelle. En janvier 2021, lors d’un stage à Hyères, on voit de très bonnes choses en termes de vitesse, de comportement sur le bateau, on sent qu’ils ont bossé, mais en arrivant au Mondial, on les voyait plutôt autour de 8-9-10, leur troisième place a été une bonne surprise et le point de départ de beaucoup de choses.”Effectivement, les trois années suivantes sont pavées d’or, avec trois titres de champions du monde jeunes consécutifs, du jamais vu pour la voile française ! Cerise sur le gâteau, ils terminent quatrièmes des championnats du monde seniors en octobre 2022, en Israël. Les secrets de cette réussite ? “Le temps qu’ils ont mis à construire leur duo, leur bienveillance l’un envers l’autre et la prise en compte de l’épanouissement de l’autre sur le bateau, répond Philippe Boudgourd. Rien n’est décidé de manière unilatérale, les grandes directions, ils les prennent ensemble, on peut même dire que si Lucie n’est pas d’accord, ça ne partira pas. Dans les deux, celle qui peut mordre le plus, c’est Lucie !

Loïc Billon ajoute : “On connaissait le talent de Matisse, qui a très vite été performant en jeune, avec un très bon toucher de barre et un gros sens de la glisse, à cela sont venus s’ajouter l’intelligence tactique, la maturité et l’exigence de Lucie qui est une combattante.” Cette dernière, en plus de posséder “un gabarit de fou pour le 470” (1,88 m), dixit Philippe Boudgourd, a en effet développé un esprit de compétition qui fait dire à son coéquipier : “J’ai fait trois fois plus de compétition qu’elle, mais moi dans la voile, j’aime tout, l’entraînement y compris, alors qu’elle vit vraiment pour la compète, elle a un esprit combatif qui porte l’équipage. On n’a pas exactement les mêmes caractéristiques et les mêmes points forts, on se complète énormément.”

Objectif podium

Reste, désormais, à franchir la marche supérieure, c’est-à-dire s’imposer chez les seniors, où ils prennent la succession du duo Camille Lecointre/Jérémie Mion, qu’ils ont titillé puis, une fois la sélection annoncée, accompagné lors de la précédente olympiade. “C’était extraordinaire, parce que comme ils savaient qu’ils allaient tourner la page du 470 après les Jeux, ils nous ont beaucoup donné, il y a eu énormément de transparence entre nous, on se disait vraiment tout sur tous les sujets”, se réjouit Lucie de Gennes. Les deux jeunes Tricolores ont vécu de l’intérieur les Jeux de leurs aînés (finalement 6e) et donc appris beaucoup de choses, “surtout sur l’aspect gestion de l’événement et préparation finale”, précise Matisse Pacaud.Désormais numéros 1 français, les duettistes vont forcément être davantage attendus, de leurs adversaires, mais également de l’encadrement, ce que confirme Franck Citeau, nouveau manager de la performance de l’équipe de France : “Ils étaient jusqu’ici protégés par Jérémie et Camille, maintenant, ce sont les têtes d’affiche, il va falloir assumer. On va le savoir très vite, mais depuis Palma (où ils ont terminé 7e), on sent déjà une forte progression, ils ont animé les débats à Hyères (7e également), les choses sont en train de se mettre en place. Le Championnat d’Europe va être un bon galop d’essai, avant le Championnat du monde où j’attends vraiment une perf de leur part.” C’est-à-dire ? “Un podium. Ce serait mérité pour l’implication et le sérieux qu’ils mettent et une consécration pour leur entraîneur qui est plus qu’investi et a monté cet équipage de toutes pièces.”

Philippe Boudgourd, interrogé sur la marge de progression de ses protégés, indique de son côté : “Pour l’instant, ils ont un très léger caillou dans la chaussure en termes de vitesse dans la tranche 8-12 nœuds, au près notamment. Et dans le comportement tactique, ils doivent être capables de passer du gagne-petit/perd-petit, qui a jusqu’ici été productif, à un tout petit peu plus de prise de risque pour prendre des points ; s’ils ont une conviction, il faut qu’ils y aillent à fond.” La voie est tracée pour deux jeunes qui ne cachent pas leurs hautes ambitions pour les Jeux 2028.

Et après ? Si Lucie de Gennes ne veut pas voir plus loin que Los Angeles, Matisse Pacaud, qui a goûté l’an dernier à la Youth America’s Cup avec Orient Express L’Oréal Racing Team, rêve de Coupe de l’America.

Photo : Sailing Energy

Tip & Shaft est le média
expert de la voile de compétition

Course au large

Tip & Shaft décrypte la voile de compétition chaque vendredi, par email :

  • Des articles de fond et des enquêtes exclusives
  • Des interviews en profondeur
  • La rubrique Mercato : l’actu business de la semaine
  • Les résultats complets des courses
  • Des liens vers les meilleurs articles de la presse française et étrangère
* champs obligatoires


🇬🇧 Want to join the international version? Click here 🇬🇧