Comment Justine Mettraux repart sur le Vendée Globe 2028 avec un Imoca neuf

Justine Mettraux, soutenue par ses sponsors de l’édition 2024, TeamWork et le groupe Snef, a officialisé, le 26 mai, le lancement d’une nouvelle campagne de Vendée Globe, avec à la clé la construction d’un plan Verdier chez CDK, dont la mise à l’eau est prévue au printemps 2027. Tip & Shaft vous en dit plus.

Le 25 janvier dernier, Justine Mettraux décrochait la huitième place du Vendée Globe 2024-2025, après 76 jours de course à bord de TeamWork-Team Snef (ex-Charal 1 plan VPLP de 2018), devenant à l’occasion la femme la plus rapide autour du monde. Initialement, le contrat avec ses deux sponsors titres, TeamWork et le groupe Snef, devait prendre fin à l’issue de la saison 2025, disputée sur le même bateau, mais rapidement, l’idée de repartir pour une deuxième campagne a été mise sur la table.

“Les discussions ont commencé quelques semaines après l’arrivée. Satisfaits de cette première expérience, les partenaires étaient partants pour revenir en 2028, et moi aussi”, raconte la skippeuse. “Le résultat sur cette édition 2024 a été déterminant dans le fait de relancer un nouveau projet, indique pour sa part Philippe Rey-Gorrez, PDG de TeamWork, fidèle sponsor de Justine depuis 2012, en Mini 6.50, Class40, Figaro et donc Imoca. Avec Snef [qui a rejoint le projet en tant que co-partenaire début 2024, NDLR], l’engouement a été commun pour prolonger l’aventure, avec une réelle ambition de progression. Cela nous a semblé naturel, une suite logique.”

Restait, avant d’officialiser ce nouveau projet, à en dessiner les contours. L’un des axes essentiels a été le choix du bateau, sachant que la navigatrice et ses partenaires, dans cette perspective de progression, souhaitaient disposer d’un Imoca plus performant. “Au tout début des discussions, l’option d’un rachat d’un bateau de la génération 2024 a été étudiée, dévoile Justine Mettraux. Mais au final, ils se sont vendus très rapidement. Par ailleurs, beaucoup de nouveaux foilers vont être construits (voir notre article), si bien qu’en 2028, il sera difficile de rivaliser complètement avec un Imoca de la génération précédente. Sur le dernier Vendée Globe, j’avais déjà une très belle machine, mais j’ai bien vu qu’à certains moments, je n’arrivais pas à aller aussi vite que les plus récentes. Donc l’option d’une construction a finalement été retenue.”

Ce choix effectué, il a fallu déterminer si ce futur bateau serait un sistership d’un Imoca déjà lancé ou un nouveau design. “Là encore, on a étudié toutes les possibilités, poursuit la Suissesse. Faire un sistership était une éventualité, mais il y avait des contraintes de délais, de disponibilités des architectes, des moules et des chantiers. Après réflexion, nous avons considéré qu’il fallait avoir le contrôle complet de notre projet en faisant notre propre design.”Concernant l’architecte, si “plusieurs options ont bien sûr été étudiées”, le choix de Guillaume Verdier a été jugé “le plus pertinent” par cette dernière, son équipe et ses partenaires : “Il a dessiné les derniers bateaux qui ont gagné le Vendée Globe [depuis l’édition 2012, les vainqueurs ont été des plans Verdier ou VPLP/Verdier, NDLR], ses Imoca sont polyvalents et relativement faciles à faire marcher“, souligne la navigatrice, qui a eu l’occasion de naviguer sur un plan Verdier, 11th Hour Racing, lors de The Ocean Race 2022-2023. De même, le choix de CDK s’est fait naturellement : “L’écurie qui héberge notre projet, BeYou Racing, a l’habitude de travailler avec CDK. Les deux Charal ont été construits là-bas et le chantier est à 100 mètres de nos bureaux. Cette affinité et cette proximité vont simplifier le suivi de la construction.”

Un projet plus ambitieux et un bateau neuf impliquent forcément un effort financier de la part de ses partenaires. De combien ? “Sur l’ensemble du projet, c’est quasiment du simple au double par rapport au Vendée Globe 2024, puisque l’augmentation du budget est de l’ordre de 80%, confie Philippe Rey-Gorrez. Cela représente un engagement fort, 11 à 12 millions d’euros à se répartir. Les investissements se font vraiment à parts égales avec le groupe Snef, il y a aussi des mécènes et d’autres partenaires, ce qui permet de réduire un peu notre enveloppe budgétaire.”

La volonté de continuité passe aussi par une confiance renouvelée à BeYou Racing, l’écurie de course au large de Jérémie Beyou, au sein de laquelle Justine Mettraux a déjà préparé le dernier Vendée Globe. “Nous allons assurer le suivi de conception et de construction du nouvel Imoca, puis la maintenance du bateau jusqu’au Vendée Globe 2028, confirme le quatrième du dernier Vendée Globe, qui, avec sa casquette de skipper, continue avec Charal a minima jusqu’à fin 2026. En tant que chef d’entreprise, je fais en sorte de mettre les bonnes personnes aux bons endroits, pour que les deux projets, Charal et TeamWork-Team Snef, collaborent en bonne intelligence et en toute transparence. Justine nous fait confiance et nous allons mettre notre savoir-faire à son service.”Parmi les acteurs clés du projet de cette dernière, on trouve Simone Gaeta, directeur technique, et Nicolas Andrieu, responsable du bureau d’études de BeYou Racing. Intégré à l’écurie de Jérémie Beyou depuis avril 2017, ce dernier, qui a géré la construction des deux Charal, explique, enthousiaste : “Pour nous, c’est un projet très excitant. La conception et la construction de deux Imoca nous ont permis d’engranger beaucoup de connaissances. Nous avons le sentiment que les planètes peuvent s’aligner pour concevoir un bateau juste.”

Entourée de la sorte, Justine Mettraux pense disposer de “toutes les armes pour performer“ sur le Vendée Globe 2028, un optimisme partagé par Jérémie Beyou : “Pour Justine, c’est une évolution logique et méritée. Je suis convaincu qu’avec ce nouveau projet, elle pourra décrocher de très beaux résultats. Elle a été compétitive sur toutes les courses auxquelles elle a participé, pas seulement le Vendée Globe. Je suis content qu’elle soit ainsi récompensée.”

Le planning ? “Fin 2025, les architectes livreront une forme de coque au chantier CDK pour qu’il puisse commencer à fabriquer les outillages. La construction à proprement parler débutera en avril 2026, pour une mise à l’eau prévue au printemps 2027″, détaille Nicolas Andrieu. Côté sportif, Justine Mettraux disputera cette année, sur son plan VPLP actuel, la Course des Caps et le Fastnet en équipage, le Défi Azimut et la Transat Café L’Or en double avec Xavier Macaire. Quid de la place de ce dernier dans le projet ? Celui qui est accompagné par le groupe Snef depuis 2017 n’a pas souhaité répondre à nos questions concernant la suite de ses projets à partir de 2026, tandis que le groupe Snef, également sollicité, n’a pu être joint.Justine Mettraux participera également cette saison à The Ocean Race Europe, en tant qu’équipière sur Malizia-Seaexplorer de Boris Herrmann, tandis que l’année 2026 sera allégée, la Route du Rhum ne figurant pas au programme. “Je vais pouvoir me concentrer sur le suivi de construction du nouveau bateau, commente-t-elle. Et ça va me faire du bien d’avoir une année plus cool, de respirer un peu, car depuis 2021, je fais des très grosses saisons. À partir de la mise à l’eau de Team Work-Team Snef, le rythme va à nouveau devenir très intense. On aura un an et demi pour se préparer de manière optimale au Vendée Globe. Ce timing est serré, mais gérable, à condition de mettre tous les moyens en place pour que ça se passe bien.”

Pour mémoire, Charlie Dalin, tenant du titre du Vendée Globe, avait lancé son Imoca Macif Santé Prévoyance en juin 2023, soit, justement, un an et demi avant le départ.