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Pas de creux d’après Rhum pour la Class40

Nouvelle course en double ou en équipage entre Pointe-à-Pitre et La Rochelle (en deux étapes via Horta), le Défi Atlantique ouvre samedi la saison de Class40. Si les années post-Rhum sont traditionnellement un peu creuses pour les 40 pieds, 2019 semble déroger à la règle, avec notamment deux bateaux neufs et une bonne vingtaine de tandems attendus sur la Transat Jacques Vabre.

Achevée par la victoire magistrale de Yoann Richomme sur son Lift 40 Veedol-AIC, plan Lombard mis à l’eau fin juin 2018, la dernière Route du Rhum-Destination Guadeloupe aura été un bon cru pour la Class40, avec une participation record (53 solitaires), un vainqueur qui a battu le temps de référence de l’épreuve (16 jours 3 heures et 22 minutes) et un taux d’abandon de 33% (18 sur 53), certes le plus important depuis 2006 – date de la première apparition des 40 pieds sur le Rhum – mais quasiment le même que celui de l’ensemble de la flotte (34%) et qui s’explique en bonne partie par les conditions particulièrement dantesques de la première partie de course. Le bilan technique est bon, avec seulement deux démâtages (Sam Goodchild et Maxime Sorel) et aucune perte totale, le bateau de Claire Pruvot ayant été retrouvé, commente Halvard Mabire, président de la classe. Et, sportivement, les performances ont été exceptionnelles avec un Yoann Richomme qui arrive devant certains Imoca”.

Un nouveau cycle de quatre ans débute désormais, et si les saisons post-Rhum sont traditionnellement creuses en termes de participation, 2019 devrait déroger à la règle, au moins en ce qui concerne la deuxième partie : “On a 12 bateaux sur le Défi Atlantique, on en espérait quinze, mais certains qui avaient prévu de venir ont abandonné sur la Route du Rhum et n’ont pas traversé. Pour l’instant, on n’a que 12 inscrits sur la Normandy Channel Race, mais pour le Fastnet, on est déjà à 25, et la Jacques Vabre à 20 pré-inscrits. C’est une agréable surprise, parce que dans la dernière édition après un Rhum (2015), il n’y avait que 14 bateaux, et 15 il y a deux ans”, explique Vanessa Boulaire, responsable du bureau de la classe. “On ne connaît pas le creux de la vague qu’on constate habituellement en année post-Rhum”, confirme Halvard Mabire.

Ce dernier se réjouit de voir arriver deux nouveaux projets, s’inscrivant non seulement sur la durée (trois-quatre ans), mais qui portent en plus la construction d’un nouveau bateaupour Ian Lipinksi (Crédit Mutuel), d’une part, le duo suisse Simon Koster/Valentin Gautier  (Roesti Sailing Team) de l’autre. Des nouveaux bateaux dessinés par deux architectes différents, David Raison et Sam Manuard, qui ont forcément été attentifs aux résultats du Rhum au moment d’effectuer leurs choix. Particulièrement le dernier, architecte-phare de la classe, puisqu’il a dessiné trois générations de Mach 40, dont les 40.3 d’Aymeric Chappellier et de Phil Sharp, 2e et 3e de la transat en solitaire. “Jusqu’ici, on avait toujours une petite longueur d’avance sur la concurrence, ce n’est plus le cas car tout le monde élève son niveau de jeu, il était temps pour nous de revoir notre copie, confirme l’intéressé.

Et visiblement, celui qui travaille en parallèle sur l’Imoca d’Armel Tripon a décidé de changer son fusil d’épaule en termes de carène : Le changement sera assez fondamental, confirme-t-il. Nous avons évalué virtuellement pas mal de variations de carènes sur les parcours de la Route du Rhum, de la Transat Jacques Vabre, du Fastnet et des Sables-Horta, pour, au final, choisir une des formes les plus extrêmes. Je ne dévoilerai pas de secret particulier en disant qu’on a été au max de la jauge au niveau de la largeur de l’étrave, ça va ressembler à un scow.” Le scow, c’est la marque de fabrique de David Raison qui a été le premier en Mini à miser sur ces étraves élargies, avec succès puisqu’il a remporté en proto l’édition 2011 de la Mini-Transat sur son Magnum, dont le successeur, le Maximum a écrasé la dernière avec Ian Lipinski. A propos du futur Crédit Mutuel, qui doit être mis à l’eau fin juin, ce dernier dit : “Ma démarche a été un peu différente des autres : par exemple pour le Lift [le plan Lombard de Yoann Richomme, vainqueur du Rhum, NDLR], ils ont fait un bateau classique le plus large possible qui le fait finalement ressembler à un scow, alors que nous, l’idée était de faire rentrer un scow dans la jauge. On a repris ce qui fonctionnait bien sur le Maximum, à savoir la capacité à bien marcher sous pilote et le fait d’avoir un bateau qui n’enfourne pas.”

Les gains attendus par rapport aux Lift 40 ou aux Mach 40.3 ? Si David Raison, novice en Class40, n’a pas d’éléments de comparaison, Sam Manuard répond, à propos du futur Mach 40.4 : Sur toutes les épreuves qu’on a testées virtuellement, le 4 arrive devant le 3. Dans le petit temps, il est un peu moins rapide, mais le gain au reaching compense largement. Après, les écarts ne sont pas énormes, de l’ordre de quelques heures, mais on espère qu’en dynamique, le fait d’avoir une étrave pas mal spatulée va permettre de garder plus longtemps des vitesses moyennes élevées“. Attendus pour l’été, Crédit Mutuel et Roesti Sailing Team seront guettés par la concurrence, notamment en vue de la Transat Jacques Vabre, le sommet de la saison, sur laquelle ils seront peut-être un peu jeunes, mais dont une partie du parcours peut leur convenir. “Avec leur volume à l’avant, il y a une grosse place pour eux entre l’équateur et Recife, note Aymeric ChappellierAprès, je me pose la question des efforts que ça induit, parce que ça tape vraiment fort”.

Avant de, sans doute, se lancer dans un projet de Vendée Globe à horizon 2024, le Rochelais, sur son Mach 40.3 Aïna Enfance & Avenir, sera l’une des têtes d’affiche du plateau en 2019, au même titre que Luke Berry (Lamotte Module Création) et Arthur Le Vaillant (Leyton), tous deux également à la barre de la V3 du plan Manuard – ce dernier, qui s’aligne parallèlement en Figaro, ne disputera que la seconde partie de saison. Devraient aussi compter parmi les animateurs de la saison Kito de Pavant sur le Tizh 40 Made in Midi (plan Verdier), Jörg Riechers, de retour sur un plan Owen-Clarke construit en Afrique du Sud, Bertrand de Broc qui, selon nos informations, va louer le Tizh 40 avec lequel Antoine Carpentier a couru en 2018, et William Mathelin-Moreaux, dont le partenaire, Beijaflore, a fait l’acquisition du plan Lombard vainqueur de la Route du Rhum (moyennant environ 550 000 euros HT). “L’objectif pour moi est de progresser, Beijaflore me donne les moyens de monter en compétences, confie l’intéressé, qui annonce par ailleurs qu’il sera accompagné de Marc Guillemot sur la Transat Jacques Vabre.

Du côté du marché de l’occasion, de très bons bateaux sont encore disponibles, comme les ex Corum, deuxième Mach 40.3 mis à l’eau en 2018 (mise à prix 500 000 euros HT), V&B (Mach 40.3 de 2015, 420 000 euros HT) ou Imerys, que Phil Sharp met en vente pour 320 000 euros HT. De son côté, Louis Duc, après avoir un temps envisagé de vendre son plan Lombard de 2017 après le retrait de son partenaire Carac en fin d’année dernière, a finalement décidé de le garder et de s’associer à Aurélien Ducroz en vue de la Jacques Vabre : “On a réuni un petit groupe de partenaires, ce qui nous fait dire que ça vaut le coup de se battre pour être au départ. Si on arrive à avoir 180 000 euros, on remet des voiles et on part dans de bonnes conditions, à 300 000 on fait toute la saison”, explique le Normand.

Antoine CarpentierSébastien MarssetLoïc Féquet font partie des autres marins qui cherchent du budget pour remettre ça, tandis que Halvard Mabire et Miranda Merron, après le Défi Atlantique, tenteront, faute de tour du monde en Class40 – le cheval de bataille du président de la classe -, l’aventure du Vendée Globe pour cette dernière, sur l’ancien bateau de Rich Wilson (plan Owen Clarke de 2006), qu’ils viennent de racheter : “C’est dommage qu’on n’ait rien pu annoncer en 2018, car je suis persuadé que si on avait cette course planétaire abordable financièrement, certains ne seraient pas tentés d’aller en Imoca, le succès de la Golden Globe Race le prouve”, confirme Halvard Mabire. Reste que, avec ou sans tour du monde – les inscriptions à la Jacques Vabre le montrent -, la Class40 demeure très attractive, comme le conclut Arthur Le Vaillant : “C’est une classe très internationale, toujours aussi intéressante sportivement avec de belles épreuves et des bateaux qui, chaque année, franchissent un palier. On peut encore s’attendre à une bataille de fous cette année sur la Jacques Vabre.”

Crédit photo : Tim Wright/RORC Carribean 600

 

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