L'équipe française de SailGP en action

Billy Besson : “Sur le Sail GP, le niveau est plus élevé que sur la coupe”

Semaine chargée pour Billy Besson : samedi, le quadruple champion du monde de Nacra 17 (avec Marie Riou) a été élu au conseil d’administration de la Fédération française de voile, dont il est devenu le vice-président en charge du haut niveau. Mardi, il s’est envolé pour les Bermudes pour préparer la saison de SailGP à la tête de l’équipe française. Consigné dans sa chambre en attendant le résultat de son test PCR, il en a profité pour répondre aux questions de Tip & Shaft.

Commençons par l’actualité du week-end dernier et l’élection du président de la Fédération française de voile, pourquoi as-tu décidé de t’engager auprès de Jean-Luc Dénéchau, le nouvel élu ?
Premièrement, parce que c’est le seul à m’avoir appelé, en tout cas sur le sujet du haut niveau, ensuite parce que c’était une volonté de ma part de m’impliquer au sein de la fédération. J’ai consacré 22 ans de ma carrière de sportif de haut niveau à la voile olympique, la fédération m’a beaucoup apporté tout au long de ces années, je voulais donc à mon tour lui donner un coup de main.

Tu entretenais de bonnes relations avec Nicolas Hénard, pourquoi n’avoir pas fait campagne à ses côtés ?
C’est vrai que nous avons été proches avant son élection, mais depuis, je n’ai jamais eu de nouvelles de sa part. Après, mon choix s’explique plus par le fait qu’avec Jean-Luc, on partage les mêmes valeurs humaines, on s’entend sur beaucoup de points. Et on ne se côtoie pas depuis hier, on travaille ensemble sur ce projet depuis sept mois.

Te voilà donc vice-président de la FFVoile chargée de la haute performance, ça fait quoi ?
Le titre n’est pas important pour moi. Le plus important est de travailler pour le futur de la voile. En tant que sportif de haut niveau, je suis super content d’avoir enchaîné des titres de champion du monde de Nacra 17 avec Marie, mais c’était plus la manière dont on était arrivés là qui comptait. Donc c’est là-dessus que je souhaite me concentrer, avec la volonté qu’on arrive à travailler tous ensemble, de la base, c’est-à-dire les clubs, à l’élite. En tant que sportif de haut niveau, je suis jugé sur mes résultats, c’est normal ; et quand on regarde les résultats de la fédération, et notamment le juge de paix qu’est le nombre de licenciés, c’est très dur de constater les chiffres : on est passé de 285 000 licences en 2016, quand Nicolas est arrivé à la présidence, à 230 000 trois ans après, et je ne compte pas l’année du Covid. Je ne juge pas, mais il faut qu’on essaie de redonner du souffle à tout ça. Si la masse est impactée, le haut niveau l’est forcément aussi.

Ton emploi du temps de coureur est-il compatible avec cette fonction à la fédération ?
Oui, bien sûr. C’est sûr que c’est du temps que je donne à la fédération, mais je vais m’organiser en conséquence.

On a fait 44 départs en Easy to Fly

Evoquons maintenant ta deuxième actualité, SailGP : peux-tu nous parler du programme à venir d’ici le coup d’envoi de la saison les 24-25 avril aux Bermudes ?
Avec à peu près quatre semaines devant nous, nous n’avons jamais eu autant de temps pour nous entraîner sur ces bateaux. On va en profiter pour emmagasiner le maximum d’expérience, parce que je rappelle qu’avant notre premier Grand Prix il y a deux ans à Sydney, on n’avait qu’un jour d’entraînement dans les jambes, ce qui ne nous a pas beaucoup aidés ! Donc, là, je compte sur cette période pour bien travailler, d’autant que comme on est dans une bulle sanitaire en permanence, on ne peut rien faire d’autre : interdiction formelle d’aller faire du vélo ou un footing, d’aller boire un café, de rentrer de contact avec les Bermudiens, c’est super strict. Du coup, on va passer notre temps entre l’hôtel, la base technique pour préparer le bateau et les navigations.

As-tu pu naviguer un peu en 2020 ?
On a juste fait le Grand Prix d’ouverture de la saison à Sydney, ensuite le confinement est arrivé. Heureusement, on a pu naviguer à partir de l’été en Easy to Fly, les bateaux de Jean-Pierre Dick. Même si c’est plus petit qu’un F50, ça nous a permis de faire des départs, sachant que ce sont exactement les mêmes que ceux de SailGP. On en a fait 44 en tout, c’était très appréciable de garder la main en naviguant sur des catamarans volants, on va d’ailleurs continuer le circuit ETF26 cette saison.

C’est donc la première fois que vous remettez le pied sur le F50 depuis un an, vous êtes-vous tout de même préparés en amont ?
On a passé quinze jours avec les gars pour essayer de se remémorer le fonctionnement du bateau : on a revu les manches courues et  décortiqué notre manière de fonctionner, nos manœuvres, c’est important de se questionner tout le temps pour progresser. Et on a fait un travail d’imagerie mentale pour aider le cerveau à se remettre en condition : chacun de son côté sur son poste s’enferme dans une pièce, ferme les yeux et fait sa régate, on sait ce qu’on doit faire et dire, sur quel bouton appuyer, où il est placé, où on met les pieds… Sur ces bateaux, les manches durent à peine 13 minutes, ça va très très vite, donc plus nos façons de faire sont systématiques, plus on est efficaces. C’est important de faire ce travail, notamment pour appréhender les premières navigations avec un peu plus de sérénité.

On va plutôt être dans la peau des outsiders

L’équipe a-t-elle évolué depuis l’année dernière ?
La principale nouveauté est l’arrivée d’Hélène (Noesmoen) sur le bateau, qui s’inscrit dans la volonté de SailGP d’ouvrir le circuit aux femmes et de les promouvoir dans l’environnement du haut niveau, et je pense que le but à terme est aussi de monter un équipage 100% féminin. Son atout, c’est qu’elle connaît le foil, en tout cas sur petit engin, puisqu’elle est championne du monde d’iQFoil [la future planche olympique, NDLR], elle n’est en revanche pas encore familière des gros bateaux, elle va apprendre.

Comment vois-tu la concurrence cette saison, qui s’est étoffée, avec l’arrivée d’une équipe néo-zélandaise menée par le duo Peter Burling/Blair Tuke ?
Les forces en présence sont énormes, il n’y a que des costauds ! C’est excitant, il y a tellement de niveau que j’ai hâte de me retrouver sur la ligne de départ à côté de ces gars et de voir le “premier virage” à la bouée de reaching. On va affronter des marins très aguerris sur ce support, donc nous, on va plutôt être dans la peau des outsiders. Maintenant, à ce stade de la saison, c’est difficile de faire des pronostics et de te dire quels vont être nos objectifs, je pense que nous en saurons plus après ces quatre semaines d’entraînement.

Peter Burling, James Spithill qui mène l’équipe américaine, Ben Ainslie l’équipe anglaise, Tom Slingsby avec l’Australie, Nathan Outteridge avec le Japon et on en passe, ce circuit F50 a vraiment un parfum de Coupe de l’America, non ?
Oui, complètement ! Je dirais même que le niveau est plus élevé que sur la Coupe de l’America, c’est vraiment l’élite de la voile mondiale, c’est génial de se confronter à une telle concurrence. Et le format est différent : la Coupe, c’est du match-racing, SailGP, ce sont des régates en flotte où tout le monde peut tirer son épingle du jeu à tout moment.

Justement, qu’as-tu pensé de la Coupe de l’America ?
C’est toujours un super événement avec des bateaux assez dingues. Il y a trois ans, tout le monde riait quand on parlait de faire voler un monocoque de cette taille et à l’arrivée, c’est ce qui s’est passé, c’était passionnant du point de vue technologique. En revanche, je trouve que la technologie prend tellement le dessus que la régate est parfois moins attrayante à regarder. Je ne veux pas comparer avec SailGP, où il y a aussi beaucoup de technologie, mais avec des régates à huit bateaux, le spectacle est plus intense.

Photo : Eloi Stichelbaut / France SailGP Team

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