Flotte Ultim Finistère Atlantique

Ce qu’il faut retenir de la Finistère Atlantique

Le Maxi Edmond de Rothschild (Charles Caudrelier) a remporté jeudi la Finistère Atlantique-Challenge Action Enfance, avec 26 minutes d’avance sur Banque Populaire XI (Armel Le Cléac’h). Tip & Shaft débriefe la course en compagnie de trois experts, Pascal BidégorryChristian Dumard et Erwan Tabarly.

“Un super parcours, un format en équipage qui a permis d’être à bloc pendant une semaine, ils se sont régalés.” Voilà comment Pascal Bidégorry, qui navigue avec François Gabart sur SVR Lazartigue (absent car non admis à ce jour dans la classe Ultim 32/23), résume la première Finistère Atlantique-Challenge Action Enfance. “C’était un triangle sympa, avec trois longs bords, au cours desquels ils ont eu droit à du portant, du travers et du près, ce qui a rendu la course super intéressante à suivre”, ajoute Erwan Tabarly, entraîneur au pôle Finistère de Port-la-Forêt, où les trimarans sont attendus en septembre pour deux stages d’entraînement.

“Au niveau météo, la situation a été assez simple, confirme Christian Dumard, spécialiste de l’analyse météo. Ils ont globalement navigué dans le même système du début à la fin, avec un long bord de près pour finir dans 25 nœuds de vent, ils ne s’entraînent jamais aussi longtemps au près, ils ont sûrement appris beaucoup de choses.”

Notamment que les bateaux allaient plus vite qu’ils ne le pensaient à cette allure, ce qu’a souligné à l’arrivée le vainqueur Charles Caudrelier. Et qui a également surpris nos experts : “J’avais fait des routages par rapport à des polaires qui tiennent la route, ils ont été beaucoup plus rapides, davantage au près qu’au portant”, confirme Erwan Tabarly. “Par rapport à mes routages de départ, les premiers ont gagné une demi-journée, soit 6-7% du temps de course, ce qui fait un bon nœud au près”, ajoute Christian Dumard.

 

De la vitesse plus
que de la stratégie

 

Dans les conditions météo stables rencontrées, les différences se sont peu faites stratégiquement, même s’il y a eu un peu de jeu, notamment entre les Açores et Concarneau, avec une séparation de trafic au large du Portugal entre le Maxi Edmond de Rothschild et Banque Populaire XI“Le choix était entre une route plus rapide sur le papier qui passait près du cap Finisterre mais avec plus de mer et des conditions plus dures et une route ouest avec moins de mer mais plus longue, Banque populaire n’est finalement pas allé jusqu’au cap Finisterre car les conditions étaient trop dures, et ils ont croisé ensemble, résume Christian Dumard.

Qui ajoute : C’est plus sur le dernier virement qu’il y a eu un peu d’écart, Gitana a viré un peu plus sud que Banque Pop qui, à mon avis, a été un peu trop loin sur ce bord, ils auraient pu virer une heure plus tôt, ils n’ont pas réussi à compenser leur petit écart latéral par un gain de vitesse. Maintenant, je ne suis pas sûr que ça aurait suffi pour combler les 25 minutes de différence à l’arrivée.” 26 minutes et 2 secondes, précisément, entre le Maxi Edmond de Rothschild et Banque Populaire XI, qui ont quasiment parcouru la même distance (4 132 milles pour le premier, 4 156 pour le second, à 27,6 et 27,7nœuds de vitesse moyenne réelle).

 

Banque Populaire XI
en nets progrès

 

Les deux bateaux n’ont jamais été éloignés de plus de 30 milles, c’était super intéressant, analyse Erwan Tabarly. Au début, Gitana avait un peu plus de facilité dans le petit temps, ce qui lui a permis de prendre les devants, ensuite l’écart s’est stabilisé, ils ont un potentiel très proche, quand ils naviguaient quasiment à vue, c’était difficile de dire lequel était plus rapide.” A quoi s’est jouée la victoire du Maxi Edmond de Rothschild ? “A rien, sur des petits réglages, poursuit le coach du pôle de Port-la-Forêt. On sait que chez Gitana, ils connaissent très bien leur bateau, alors que chez Banque Pop, ils sont encore un peu dans l’apprentissage, l’intéressé rappelant que le bateau d’Armel Le Cléac’h a été mis à l’eau il y a un peu plus d’un an, en avril 2021.

Pascal Bidégorry note quant à lui : “Banque Populaire a vraiment franchi un gros step, j’ai même eu l’impression que par moments, ils allaient un poil plus vite que Gitana, je ne m’attendais pas forcément à voir aussi peu d’écarts entre les deux pendant toute la course. Pour moi, les modifications sur les appendices (foils et dérive, menées l’hiver dernier) portent leurs fruits. L’aéro, c’est important sur ces bateaux, mais ce que tu as dans l’eau reste primordial.”

 

Des enseignements
en vue du Rhum ?

 

Quid de Sodebo Ultim 3 qui va terminer ce vendredi sur la troisième marche du podium et étrennait ses nouveaux foils ? “Quand on a des nouveaux foils, il faut forcément apprendre à bien les utiliser, estime Christian Dumard. Et le fait que les deux premiers aient été toujours au contact les a aidés à trouver plus facilement ou améliorer les réglages, c’était moins évident de s’étalonner pour Sodebo qui a navigué plus seul.”

Sauf sur la première partie de parcours, ce qui fait dire à Erwan Tabarly : “Dans la brise au portant, Sodebo va très bien, il a décroché un peu plus quand ça a molli.” Pascal Bidégorry ajoute : “Je pense aussi que la dérive et son élévateur sont aussi des éléments hyper importants, tu peux avoir les mêmes foils sur tous les bateaux, celui qui a un petit truc qui ne marche pas très bien sur sa dérive va avoir un gros handicap.” Et Sodebo Ultim 3 disposera d’une nouvelle dérive en septembre.

Cette Finistère Atlantique permet-elle de tirer des conclusions en vue de la Route du Rhum-Destination Guadeloupe ? “Même si l’équipage et le solitaire sont très différents, je reste persuadé que Gitana a beaucoup d’armes : ils connaissent de manière parfaite tous les modes d’utilisation du bateau, à toutes les allures et par toutes les forces de vent. C’est un gros plus quand tu te retrouves tout seul, répond Pascal Bidégorry.

“Sur une Route du Rhum, il peut y avoir beaucoup de mer, ce qui n’a pas été le cas sur cette course, donc il faut rester mesuré, ce qui laisse d’ailleurs toutes ses chances à Actual qui reste un très bon bateau”, estime quant à lui Christian Dumard. Le trimaran d’Yves Le Blevec aura été le seul à avoir été victime d’une casse (dérive), suite à une collision avec un ofni. Ce qui fait dire à Erwan Tabarly : “Il n’y a pas eu trop d’avaries sur les bateaux menés à 100% pendant six jours de mer, dans la perspective de la Route du Rhum, c’est un point positif de voir que la fiabilité est au rendez-vous.”

Photo : Alexis Courcoux

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