A un an du départ de l’Arkea Ultim Challenge-Brest, dont le départ sera donné le 7 janvier 2024, la classe Ultim s’est dotée d’un nouveau secrétaire général, Stéphane Guilbaud. L’occasion pour Tip & Shaft de faire le point sur les dossiers prioritaires qui attendent ce dernier.
Après Emmanuel Bachellerie, délégué général de début 2018 à fin 2020, Jean-Bernard Le Boucher, directeur général de juillet 2021 à avril 2022, date à laquelle, nous a-t-il confirmé, il a démissionné, c’est donc Stéphane Guilbaud qui assure depuis le 9 janvier la direction opérationnelle de la classe Ultim 32/23 en tant que secrétaire général (prestataire).
Ce dernier est loin d’être un inconnu dans l’univers de la voile de compétition, puisqu’il a accompagné Franck Cammas pendant près de vingt ans (Figaro, Orma, Groupama 3, Volvo Ocean Race…) avant de passer par Spindrift Racing et l’équipe française de SailGP, dont il a été team manager lors de la première saison, en 2019. Depuis, il travaillait dans l’immobilier au Portugal, avant de recevoir un coup de fil courant 2022 : “On m’a demandé si le poste pouvait m’intéresser, j’ai répondu oui, j’ai passé une batterie de tests et d’entretiens, c’est la première fois de ma vie que ça m’arrivait. Et finalement, en décembre, on m’a annoncé que c’était bon.”
L’officialisation est intervenue le 5 janvier, fruit d’un processus entamé “avant l’été dernier”, selon Emmanuel Bachellerie, cofondateur de la société Ultim Sailing, seul membre de la classe ayant accepté cette semaine de répondre à nos sollicitations. “Chacun de notre côté, on a pensé à des gens, ce qui nous a permis de faire une « long list » d’une vingtaine de noms, qu’on a réduite à deux ou trois. On a ensuite échangé avec les intéressés et porté notre choix sur Stéphane, qui a non seulement une vision très large de ce que sont nos machines, mais aussi une motivation en platine et un parcours qui parle pour lui.” Même satisfaction pour Yves Le Blevec, directeur général du team Actual (voir ci-dessous) : “Stéphane connaît parfaitement le métier et l’environnement de la course au large, il n’est ni coureur, ni armateur, ni organisateur, et il n’a pas l’ambition de l’être, c’est très bien ! On va pouvoir avancer avec beaucoup plus de sérénité.”
Le serpent de mer du programme
La feuille de route du nouveau secrétaire général de la classe ? “La même que celle de mes prédécesseurs, c’est-à-dire d’abord organiser un programme un peu plus ambitieux que celui qui existe aujourd’hui, ensuite m’arranger pour qu’il y ait un plateau sur toutes les courses de ce programme.” Un vrai challenge pour une classe qui, depuis sa création, n’a jamais véritablement réussi à inscrire un programme sur la durée, en raison des intérêts parfois divergents de ses membres.
Le report de Lorient-Les Bermudes-Lorient, qui devait avoir lieu en mai prochain, en est un bon exemple. “Vu les montants que nous avions sollicités auprès des collectivités, nous attendions en retour une certaine résonance médiatique, donc une communication si possible un an en amont et un plateau suffisant, raconte Jean-Philippe Cau, président de Lorient Grand Large, l’organisateur. Compte tenu de la problématique de la classe avec l’équipe de François Gabart l’année dernière, on avait transigé sur le 15 décembre comme date limite d’inscription. Finalement, seulement trois équipes étaient prêtes à s’engager fermement [Banque Populaire, Actual et Sodebo, NDLR], c’était incompatible avec l’événement tel qu’on souhaitait le faire, on a donc décidé de ne pas donner suite à cette édition.”
Le projet n’est pour autant pas annulé. “Pas plus tard qu’hier (mercredi), j’ai commencé à discuter avec le nouveau secrétaire général, poursuit Jean-Philippe Cau. L’état d’esprit a changé, il semblerait que les membres de la classe se mettent en ordre de marche derrière la classe et pas le contraire. Donc si tout le monde joue le jeu, cette course pourrait avoir lieu plus tard, sachant qu’elle ne s’adresse pas uniquement à la classe Ultim, on voudrait bien attirer des MOD70.”
Le programme Ultim 2023 ne comprend pour l’instant que le Fastnet et sans doute les 24H Ultim, dont la deuxième édition devrait avoir lieu fin septembre à Lorient. “On veut faire cet événement tous les ans et la Finistère Atlantique tous les deux ans”, confirme Emmanuel Bachellerie, dont la société Ultim Sailing est l’organisatrice de ces deux événements. Pour le reste, Stéphane Guilbaud planche sur le sujet, confiant : “L’idée est de créer un championnat annuel avec trois « petites » courses en équipage et en solitaire, qui se dérouleraient sur un week-end, et deux moyennes/grandes courses, une en équipage et une en solitaire. Avec en plus notre course autour du monde tous les quatre ans.”
Nouvelles têtes
Une course autour du monde, l’Arkéa Ultim Challenge-Brest, dont l’édition inaugurale s’élancera le 7 janvier 2024. Avec combien de bateaux au départ ? La convention entre la classe et l’organisateur, OC Sport Pen Duick, impose un minimum de quatre participants, ils sont cinq inscrits à ce jour : Charles Caudrelier, Thomas Coville, Armel Le Cléac’h, Eric Péron, qui loue à Ultim Sailing l’ex Mieux, avec lequel Arthur Le Vaillant a couru la dernière Route du Rhum, et… Anthony Marchand, qui succède à Yves Le Blevec à la barre d’Actual, ce dernier devant directeur général du team.
Une annonce officialisée vendredi dernier, au terme d’une réflexion qui selon Yves Le Blevec, a démarré il y a un an : “Depuis le début de mon histoire avec Actual, j’essaie de m’interroger de la façon la plus loyale possible sur ce que je peux proposer à mon partenaire pour optimiser la réussite du projet. Ça passe par des améliorations des performances du bateau, ce que nous ferons en 2023 avec une évolution majeure communiquée ultérieurement, mais l’année dernière, j’ai dit à Samuel Tual (PDG d’Actual) qu’on pouvait aussi s’interroger sur le pilote. Sur la Route du Rhum, je me sentais légitime d’y aller, pour le tour du monde, entre le travail de préparation à mener d’une part et l’envie d’Antho d’autre part, je me suis dit que c’était le bon moment pour faire la transition.”
La saison 2023 aura donc un air de renouveau avec, en plus d’Anthony Marchand et d’Eric Péron, actuellement en pleine recherche de partenaires pour un budget qu’il évalue à environ 1,5 million d’euros, un possible changement à la barre de SVR Lazartigue. Des bruits de plus en plus insistants, parfois alimentés par d’autres skippers de la classe (voir notre interview de Thomas Coville), font en effet état de l’arrivée de Tom Laperche à la place de François Gabart. Interrogé par Tip & Shaft en décembre, le vainqueur de la Solitaire du Figaro 2022 n’avait pas souhaité commenter, tout en confiant son envie de continuer en Ultim ; du côté de MerConcept, on nous a fait savoir qu’il n’y avait “pas de communication prévue à date”.
Quel que soit le skipper du plan VPLP, sa participation éventuelle à l’Arkea Ultim Challenge-Brest dépendra de la résolution du conflit opposant la classe à l’équipe SVR Lazartigue sur la conformité du trimaran aux règles de la classe. Sujet sur lequel des avancées semblent se dessiner, même si tout le monde botte en touche quand il s’agit de l’évoquer. “Je reprends le dossier, il est lourd, mais pour l’instant, on a décidé de ne pas en parler“, répond Stéphane Guilbaud. Emmanuel Bachellerie consent à ajouter : “On a eu en novembre une réponse de l’arbitre incontestable [l’interprétation de World Sailing à partir des vrais plans du bateau], ça a permis d’ouvrir des discussions avec l’équipe de François, est-ce qu’elles aboutiront ? On le souhaite ardemment.”
Photo : Alexis Courcoux
