SVR Lazartigue Ultim

L’équipe SVR Lazartigue se projette désormais vers l’avenir

L’équipe SVR-Lazartigue a tenu un point presse mercredi à la Maison de la Bretagne à Paris pour annoncer que Tom Laperche disputerait l’Arkea Ultim Challenge-Brest début 2024, François Gabart souhaitant se concentrer sur le double et l’équipage. L’occasion aussi de revenir sur son intégration au sein de la classe Ultim 32/23, annoncée il y a deux semaines.

C’était un secret de Polichinelle, dans la mesure où l’information avait fuité depuis quelques semaines : c’est donc bien Tom Laperche, et non François Gabart, qui prendra le départ le 7 janvier 2024 de l’Arkea Ultim Challenge-Brest, première course autour du monde en solitaire en Ultim, à la barre de SVR-Lazartigue. Si l’annonce a été officialisée mercredi à Paris lors d’un point presse, elle est le résultat d’un processus entamé depuis plus de deux ans.

“C’est un choix longuement réfléchi, qui a germé dès la construction du bateau, a confirmé François Gabart. Aujourd’hui, j’ai envie de naviguer en équipage et de transmettre. Je viens d’avoir 40 ans, c’est une logique assez naturelle par rapport à mon évolution de marin, ce n’est pas une décision soudaine.” Ni liée, selon lui, à une quelconque usure consécutive à l’affaire qui a opposé son équipe à la classe Ultim 32/23 l’an dernier (voir ci-dessous).

Cette décision de transmettre la barre pour l’Arkea Ultim Challenge-Brest, François Gabart l’a en effet envisagée dès 2021 : “Avec Kresk, c’était une possibilité qu’on s’était donnée dès le début, on était alignés là-dessus”, confirme le Charentais. Didier Tabary, président du groupe Kresk, absent mercredi, mais que Tip & Shaft a pu joindre jeudi, est sur la même longueur d’ondes : “Depuis le début du projet, ce sujet avait été posé sur la table, la question était de savoir si on trouverait le bon skipper.

 

“Tom a le talent, la maturité, l’envie
et l’énergie pour ce défi”

 

François Gabart propose, d’abord dans l’optique de la Transat Jacques Vabre 2021, le nom de Tom Laperche, avec lequel, depuis une première rencontre en 2017 lors d’une navigation commune en Flying Phantom à Saint-Lunaire, il est toujours resté en contact. Ce dernier a même fait son stage de fin d’études d’ingénieur chez MerConcept au moment de la conception et de la construction de l’actuel SVR-Lazartigue.

Le sponsor d’accord, François Gabart va alors trouver Tom Laperche, qui raconte à Tip & Shaft : “Quand le bateau était en construction, François m’avait déjà proposé de faire partie de l’équipage, mais c’était encore assez flou au niveau du programme. La vraie proposition pour la Transat Jacques Vabre et, pourquoi pas, pour l’Arkea Ultim Challenge, est arrivée il y a deux ans à Concarneau, juste avant le départ de la transat en Figaro. Sur le coup, j’ai dit oui tout de suite pour la Jacques Vabre ; pour le tour du monde, je savais que j’en avais envie, mais j’étais plus réservé sur mes capacités à le faire.”

Plusieurs entraînements en 2021, une Transat Jacques Vabre, terminée à la deuxième place, et d’autres navigations en 2022, dont une qualification en solitaire pour le Rhum en tant que skipper remplaçant, finissent par convaincre celui qui est alors encore figariste d’accepter : J’ai dit oui courant 2022. Il y a forcément toujours de l’appréhension, parce qu’un tour du monde en solitaire en Ultim relève de l’exceptionnel, mais je m’en sens capable. Et c’est une sorte de continuité, je fais partie de ceux qui ont le plus navigué sur le bateau.”

Pour François Gabart, qui évoque “une pause à court et moyen terme” pour ce qui est de la navigation en solitaire, sans jurer pour autant qu’il y renonce définitivement, “c’est devenu une évidence pour nous tous que Tom était la bonne personne pour être au départ du tour du monde. Il a le talent, la maturité, l’envie et l’énergie pour ce défi.” D’ici là, le Trinitain – qui doit encore disputer la courte étape de The Ocean Race entre Aarhus et La Haye à bord de Holcim-PRB – et son aîné vont disputer ensemble la Transat Jacques Vabre, un peu plus de deux mois avant le départ de la course autour du monde.

 

François Gabart peu enclin
à parler du passé

 

Un enchaînement serré, annoncé il y a deux semaines par la classe Ultim 32/23, alors qu’initialement, la Transat Jacques Vabre n’était pas prévue au programme (voir notre article), auquel l’équipe SVR Lazartigue adhère. “On est très satisfaits d’être au départ de la Jacques Vabre, le groupe Kresk aussi, qui va pouvoir mettre en avant ses marques”, confirme la team manager, Cécile Andrieu, présente mercredi lors du point presse parisien.

Un rendez-vous au cours duquel l’assistance a souhaité revenir sur les raisons qui ont conduit SVR-Lazartigue à être intégré dans la classe, alors que la situation a longtemps été bloquée. D’autant, qu’en dehors de propos cités dans le communiqué de presse envoyé par la classe, l’équipe ne s’était pas exprimée. Si François Gabart s’est montré peu enclin à aborder le sujet, Cécile Andrieu, tout comme Didier Tabary et d’autres interlocuteurs, joints depuis par Tip & Shaft, ont été plus prolixes.

Tous racontent peu ou prou la même chose : un premier rapprochement sous le soleil de Pointe-à-Pitre, un accord en bonne et due forme entre les parties en décembre pour trouver une solution, avant l’arrivée en janvier, jugée décisive par tous, de Stéphane Guilbaud au poste de secrétaire général de la classe.

“Le dialogue n’a jamais été complètement rompu, même si les positions des uns et des autres étaient diamétralement opposées, commente Didier Tabary. Nous nous étions parlé à l’arrivée de la Route du Rhum, chacun a réfléchi et compris que c’était dans l’intérêt de tous de faire un pas vers l’autre, notre bateau est fait pour courir et la classe pour accueillir le plus de bateaux possible. Les choses ont ensuite été plus faciles sous l’égide de Stéphane Guilbaud, qui a été un catalyseur. Avec une compétence reconnue et un œil neuf sur la situation, il a pu proposer des solutions acceptables par tous.”

 

Réunion décisive
dans le cockpit de SVR

 

Contacté par Tip & Shaft, ce dernier explique : “Ce que j’ai amené, c’est que j’étais extérieur à l’histoire, mais il y a aussi eu l’implication des marins, et dans ce cas précis, deux ont été très présents : François d’un côté, Armel (Le Cléac’h) de l’autre. Ça n’a pas été des histoires de menaces, de pressions ou d’avocats, mais plus l’envie de trouver des solutions maritimes concrètes.”

Et le secrétaire général de dévoiler : “J’ai demandé à SVR-Lazartigue d’accepter de faire venir les équipes « adverses » à bord du bateau, dans le chantier. Mi-février, on s’est donc tous retrouvés dans le cockpit de SVR, on a pris des mesures et on a acté les modifications pour que l’équipe de François puisse faire les travaux. On a vraiment été dans le détail. D’abord parce que sur ces bateaux très poussés technologiquement, un centimètre ou un kilo, ça compte. Ensuite pour ne pas retomber dans des déceptions ou des incertitudes.”

Des modifications que Cécile Andrieu rappelle : Le cahier des charges, c’était d’améliorer la visibilité depuis le cockpit, de façon à ce que l’opérateur à la colonne puisse voir l’environnement extérieur et l’horizon aussi bien que le barreur. Charge à nous de trouver les moyens d’y répondre sans détériorer massivement la performance. On rehausse donc la colonne de winches d’une quarantaine de centimètres, ce qui nous oblige à élargir et à agrandir la bulle qui recouvre le poste de winch.”

 

“Cette page est désormais
définitivement tournée”

 

SVR-Lazartigue perdra-t-il en performance avec ces modifications ? Joint par Tip & Shaft, Xavier Guilbaud, architecte qui a œuvré à sa conception chez VPLP Design, répond : “Ce n’est pas de la cosmétique, il y a pas mal de petites modifications, ils ont notamment dû remonter la bôme, sinon, elle risquait de taper dans la bulle du wincheur. En tout, ça va peut-être coûter une centaine de kilos en plus et un tout petit peu en aéro, mais c’est vraiment marginal, on ne l’a même pas quantifié.” Ces travaux, supervisés par le jaugeur de la classe, René Boulaire, seront terminés dans les prochaines semaines pour une mise à l’eau en mai, date à laquelle il recevra officiellement son certificat de jauge.

“Cet accord va nous permettre de se concentrer sur la raison d’être de notre investissement, à savoir le sport et le plaisir de naviguer vite. L’essentiel pour moi était que le bateau ne perde pas son ADN et reste compétitif et ergonomique, c’est le cas avec les modifications acceptées, tout le monde a retrouvé une forme de bon sens, cette page est désormais définitivement tournée”, se réjouit Didier Tabary. Le patron de Kresk a-t-il un moment songé à jeter l’éponge ? “S’il n’y avait pas eu d’accord, le programme aurait été différent, on l’aurait concentré sur des records ; mais non, on avait pris cet engagement [pour quatre ans, soit jusqu’à l’été 2025, NDLR], il était hors de question de ne pas le tenir.”

Des records, il y en aura tout de même au programme, avec le Trophée Jules Verne dans le viseur fin 2024, qui sera le skipper du bateau, entre François Gabart et Tom Laperche ? Le Trophée Jules Verne se construit dès maintenant, il est déjà intégré dans nos réflexions sportives et techniques, on est tous les deux impliqués avec Tom pour constituer un équipage, je serais très heureux d’assumer les responsabilités de skipper, mais ce n’est pas une question qu’on s’est encore posée”, répond François Gabart.

Photo : Qaptur

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