Quentin Vlamynck Figaro

Quentin Vlamynck : “En Figaro, l’idée, c’est de se faire mal”

Après plusieurs saisons en Ocean Fifty aux côtés de Lalou Roucayrol et, l’an dernier, de Thibaut Vauchel-Camus, couronnées d’une deuxième place sur la Route du Rhum 2022 et d’une victoire sur la Transat Jacques Vabre, Quentin Vlamynck, 31 ans, a décidé cette année de se lancer sur le circuit Figaro Beneteau. Après le baptême à Bordeaux le 15 février de son bateau Les étoiles filantes, le skipper aquitain explique ce choix à Tip & Shaft.

▶︎ Tu étais ces dernières années très catalogué Ocean Fifty, notamment sous les couleurs d’Arkema, pourquoi ce choix de changer de support ?
Je suis arrivé chez Lalou Multi, devenu l’an dernier Neo Sailing Technologies, en 2010, j’avais été recruté par Fabienne et Lalou Roucayrol qui était à l’époque skipper d’un Ocean Fifty et a très vite émis le souhait d’organiser une transmission progressive pour me permettre, un jour, de barrer un multicoque. Ce qu’on a réussi à faire puisque j’ai disputé la dernière Route du Rhum à bord d’Arkema 4, un bateau construit au chantier. Après dix ans de sponsoring, Arkema nous a annoncé en mars 2022 que le partenariat allait s’arrêter en fin d’année, donc on s’est mis à chercher un nouveau projet à lancer.

▶︎ Quelles étaient vos options ?
Il y avait celle de garder le bateau dont Lalou Multi était propriétaire, mais on n’a pas réussi à trouver suffisamment de financement pour le garder, il a alors été vendu à Thibaut (Vauchel-Camus) qui m’a proposé de faire la saison 2023 avec lui. C’était génial, d’autant que ça s’est conclu par une victoire sur la Transat Jacques Vabre. Après la vente du bateau, je me suis d’abord posé la question de savoir si j’avais envie de continuer à naviguer, la réponse a été vite positive, mais je voulais donner un peu de sens à ce que je faisais, être moins égoïste. Il se trouve que j’avais Bollé parmi mes partenaires, dont la directrice de la communication, Sandie Tourondel, avait créé Les étoiles filantes, une association dont l’objectif est d’aider des enfants atteints d’une tumeur du tronc cérébral à réaliser leur rêve. Elle souhaitait, un peu comme pour Initiatives Cœur de Sam Davies, monter un projet pour porter les couleurs de l’association. Nous avons commencé à plancher dessus en mai dernier. Il a d’abord fallu trouver un support. On n’a pas été sur le Class40 car on en avait déjà un dans l’écurie pour Keni (Piperol), l’Imoca nous paraissait trop lourd et trop cher, la classe Figaro m’est apparue plus facile d’accès. A la fois pour acheter le bateau (l’ancien Action Enfance de Loïck Peyron et Amélie Grassi) et parce que c’est beaucoup plus léger en termes de logistique. Ça me permettait en plus de garder du temps pour travailler sur des projets à plus long terme et continuer à accompagner Neo Sailing Technologies.

 

“On cherche 290 000 euros”

 

▶︎ Tu continues à faire partie de la structure ?
Oui, le projet reste abrité par Neo Sailing Technologies, je peux bénéficier de toute la partie administrative qui est transverse avec ceux de Keni et du Mini d’Awen Le Huec, le 900 construit au chantier. J’ai tout appris auprès de Lalou et Fabienne, leur souhait était que je puisse transmettre à mon tour aux autres skippers de l’écurie, je veux garder du temps pour eux. Et j’ai envie de continuer à accompagner la partie chantier et laboratoire pour d’autres clients, cette double casquette sportive et technique me plaît aussi.

▶︎ Quel est le budget de ton projet Figaro ?
On cherche 290 000 euros pour faire la saison complète, à la fois en solitaire et en équipage, dont le Tour Voile, on en a 140 000 pour l’instant. La recherche de partenaires prend du temps, mais on voit que ça commence à prendre, le fait d’avoir hissé les voiles la semaine dernière avec le baptême rend le projet plus concret. On espère que ça va nous permettre de boucler le budget dans les semaines à venir pour nous permettre d’être plus performants, d’avoir plus de temps pour s’entraîner et de faire naviguer plus d’enfants malades.

▶︎ Les marins disent souvent qu’après avoir touché au multicoque, ils ne peuvent plus revenir en arrière, tu fais le chemin inverse, on imagine que tu as dû être un peu surpris au niveau des sensations sur un Figaro 3 ?
C’est sûr que c’est différent ! On avance à 7 nœuds au près au lieu de 20 en Ocean Fifty, les cailloux arrivent moins vite ! Maintenant, quand on fait les entraînements à La Rochelle avec six bateaux, on est en permanence à 20 mètres les uns des autres, c’est ça qui me manquait un peu sur les trimarans, même si ça régatait de plus en plus au contact. C’est vraiment ce que je vais chercher et que je n’ai pas pu avoir sur mes deux Mini Transats (2015 et 2017) parce que j’avais des bateaux un peu différents des autres et sans doute moins performants. Là, l’idée, c’est de se faire mal et de voir comment je m’en sors par rapport au reste de la flotte. Donc oui, ça va aller moins vite, mais ça va aussi être beaucoup moins stressant au niveau de la gestion du risque, même si, à mon avis, ça va l’être beaucoup plus sur la partie régate, mais c’est un aspect qui me plaît. Je sais que je vais passer des heures à la barre et j’adore ça. Je vais revenir à des navigations que je n’avais plus l’habitude de faire depuis que j’ai quitté la Classe Mini, sans communication avec la terre, avec peu d’infos météo, des effets locaux et des courants à gérer.

 

“Ça va me faire du bien de naviguer
contre 30 ou 40 concurrents”

 

▶︎ Quelles ambitions te fixes-tu pour ta première saison sur le circuit ?
Je pense que je vais arriver à bien faire marcher le bateau, pas forcément tout de suite, mais pour l’instant, j’ai plutôt de bonnes sensations. Maintenant, je ne vais pas prétendre jouer les premiers rôles d’entrée, on voit que sur une Solitaire, des favoris qui en ont fait plusieurs se plantent encore, donc c’est difficile de mettre un chiffre sur mes ambitions. Ce qui est sûr, c’est que ça va être assez excitant parce qu’il y a encore un gros renouvellement de la flotte cette année, avec presque quinze bizuths, on sent que la classe intéresse de nouveau, notamment grâce au Tour Voile qui attire beaucoup de personnes. Les anciens restent moins longtemps sur le circuit, mais il en reste encore cette année. Ça va me faire du bien de naviguer contre 30 ou 40 concurrents, je ne sais pas trop si je serai un suiveur ou un preneur de risques, ça sera un peu au feeling, Je sais qu’il va falloir beaucoup naviguer pour comprendre le bateau et ses petites spécificités, c’est aussi pour ça que je souhaitais faire dès la première année le programme complet. Et j’ai hâte de découvrir le format de la Solitaire, avec trois fois trois jours, et de repousser mes limites au maximum.

▶︎ Combien de temps te vois-tu rester sur le circuit ? Et te projettes-tu plus loin ?
Pour le moment, notre recherche de partenaires est sur deux ans, on verra ce qu’on arrive à monter pour la suite pendant ces deux années, c’est un peu tôt pour imaginer beaucoup plus loin. Forcément, j’aimerais bien faire un jour un tour du monde, le Vendée Globe donne envie, mais ça exige des processus très longs, des budgets très élevés, donc ça me paraît très loin de ce qu’on est capables de faire aujourd’hui, je suis peut-être un peu trop réaliste pour en rêver.

Photo : Vincent Olivaud / Neo Sailing Technologies

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