Mini Transat 2021

Denis Hugues : « La Mini Transat reste toujours aussi attractive »

Les nouveaux organisateurs de la Mini Transat ont annoncé début janvier que l’édition 2021, qui s’élancera le 26 septembre des Sables d’Olonne à destination de Saint-François, en Guadeloupe, via Santa Cruz de La Palma (Canaries), faisait d’ores et déjà le plein avec 126 préinscrits pour 84 places. L’occasion d’échanger avec le directeur de course, Denis Hugues.

Évoquons d’abord le Vendée Globe : 18 des 33 marins de l’édition en cours sont passés par la Mini Transat, c’est une belle reconnaissance pour la course ?
Complètement ! On a toujours dit que la Mini était l’école de la course au large, le Vendée Globe en est un peu l’aboutissement, et c’est vrai que pas mal de marins commencent par la Mini en se disant qu’un jour, ils finiront peut-être par faire le Vendée Globe. C’est une filière assez naturelle.

Que permet d’apprendre la Mini Transat à un futur candidat au Vendée Globe ?
À se débrouiller tout seul, principalement. Dans la mesure où, sur la Mini, il n’y a pas de système de communication longue portée, quand ils ont un souci – ce qui arrive toujours sur une course longue d’environ 30 jours comme la Mini –, ils sont obligés de bricoler eux-mêmes, sans aucune assistance, pour arriver de l’autre côté. Aujourd’hui, même si les skippers du Vendée Globe ont la possibilité d’appeler leur équipe à terre, ils sont un peu dans la même configuration, ce sont eux qui ont les outils dans les mains, et ça, on l’apprend notamment sur la Mini.

As-tu des coups de cœur ou des « poulains » sur ce Vendée Globe ?
Non, ça serait mal placé. J’ai été organisateur de la Mini Transat, j’en suis aujourd’hui le directeur de course, je dis toujours que mon favori, c’est le dernier qui passe la ligne. Maintenant, je suis content pour tous les anciens ministes, forcément, ça veut dire qu’ils ont fait du chemin depuis, notamment les trois anciens vainqueurs de la Mini, Yannick (Bestaven, 2001 en proto), Thomas (Ruyant, 2009 en proto) et Armel (Tripon, 2003 en proto). Mais il y en a d’autres : des gens comme Pip Hare ou Clément Giraud sont eux aussi passés par la Mini, ils n’étaient pas dans le Top 10, mais on voit que ce sont quand même de bons marins qui arrivent à se débrouiller. Franchement, le changement de safran de Pip, ce n’était pas évident à faire. On voit aussi que parmi les filles qui font le Vendée, presque toutes sont passées par la Mini-Transat [5 sur 6 : Pip Hare, Sam Davies, Isabelle Joschke, Alexia Barrier, Clarisse Crémer, NDLR] qui leur est plus accessible que les autres courses pour apprendre le large. Et là encore, elles se débrouillent plutôt pas mal.

Ce qui est marquant cette année, c’est le turn-over
Parlons maintenant de la prochaine Mini Transat, qui a changé d’organisateur, de villes de départ, d’escale et d’arrivée, cela nécessite-t-il de repartir de zéro ?
Non, pas de zéro, mais on reprend beaucoup de choses. Déjà, il y a forcément un rapport différent avec l’organisateur qui est nouveau et doit, de son côté, apprendre à organiser la Mini qui est quand même une grosse course, il suffit de voir le nombre de préinscrits. Il faut donc reformer une équipe, ce que s’attache à faire Marc Chopin [président des Sables d’Olonne Vendée Course au large], ça prend forcément un peu de temps. La complexité en plus, cette année, c’est la situation sanitaire : on n’a pas de visibilité sur ce que sera la situation à l’automne 2021, ça n’est pas évident à gérer, parce qu’on ne sait pas si on travaille pour rien ou pas.

L’organisation a reçu 126 dossiers de préinscriptions pour 84 places disponibles, est-ce dans la norme ?
C’est assez proche, oui, ça prouve que la Mini Transat reste toujours aussi attractive. Ce qui est marquant cette année, c’est le turn-over, plus important que sur les autres éditions : en 2020, il y avait 80% des coureurs que je n’avais jamais vus sur le circuit Mini. Du coup, le niveau n’était pas très élevé sur les premières courses, mais je pense que d’ici le départ, ils auront tous progressé.

L’année 2020 a été amputée de nombreuses courses, ne crains-tu pas que les participants manquent justement de préparation au large ?
Non, ce n’est pas vraiment une inquiétude, parce qu’il y a un programme bien établi cette année, avec pas mal de possibilités pour les concurrents d’engranger des milles, donc si tout se passe correctement, les concurrents auront tous fait leurs 2 500 milles de qualification – 1 000 sur un parcours en solitaire, 1 500 en course, dont au moins une course ou une étape de plus de 500 milles, une course en solo et une course en 2021. C’est beaucoup, mais plus que de gagner en performance, ces 2 500 milles leur permettent de gagner en maîtrise et en indépendance sur leur bateau. Ils vont toujours rencontrer des problèmes qu’ils devront résoudre, ça leur permettra d’être capables d’y faire face au départ de la Mini.

Tanguy Bouroullec a un peu d’avance en proto
Peut-on d’ores et déjà dégager des têtes d’affiche ou des favoris pour cette édition ?
Il faudra attendre les deux premières courses de la saison, mais je pense que Tanguy Bouroullec a un peu d’avance en proto, son bateau a gagné toutes les courses sur lesquelles il était aligné l’année dernière [Les Sables-Les Açores en Baie de Morlaix avec lui à la barre, puis la Mini en mai avec Ambrogio Beccaria qui a ensuite remporté la Duo Concarneau-BFR Marée Haute avec Amélie Grassi, NDLR]. D’autant que les bateaux rapides de 2019 ont été repris par de nouveaux skippers : Fabio (Muzzollini) pour Tartine [ex-bateau d’Axel Tréhin, NDLR], Romain Tellier pour le 865 [vainqueur des deux dernières éditions avec Ian Lipinski puis François Jambou, NDLR], ce sont des bateaux pointus en réglages, il leur faut donc un peu de temps pour bien les prendre en main. En série, certains vont déjà très vite, comme Léo Debiesse ou Hugo Dhallenne, mais je n’en ferais pas des favoris dès aujourd’hui, c’est trop tôt. Je pense, en tout cas, que ça peut être plus ouvert que lors des éditions précédentes, où l’on savait dès les inscriptions qu’il y avait des marins qui connaissaient très bien leur machine et étaient potentiellement dans les favoris.

Des bateaux de série avaient fait leur apparition sur la dernière Mini, le Maxi de David Raison et le Vector d’Etienne Bertrand, y en aura-t-il d’autres pour cette édition et comment vois-tu leurs potentiels respectifs ?
Il y une nouvelle série italienne [le Wevo 6.50], mais, à mon avis, elle est un cran au-dessous des Maxi, les plus nombreux, et des Vector. Le Vector n’est pas un mauvais bateau, mais je pense qu’il est très difficile à régler pour aller vite, j’espère que leurs propriétaires auront eu suffisamment de temps pour trouver les bons réglages et pouvoir se mêler à la lutte avec les Maxi. Par ailleurs, il ne faut pas enterrer le Pogo 3 qui est un bateau éprouvé et solide, facile sur l’eau, même s’il mouille énormément par rapport, notamment, au Maxi. Et on a vu la saison dernière que les Maxi avaient rencontré pas mal de problèmes de fiabilité, notamment structurels, j’espère que le chantier aura remis de l’ordre là-dedans pour qu’on ne se retrouve pas avec ces problèmes sur la transat.

Pour finir sur les protos, tu cites Cerfrance de Tanguy Bouroullec parmi les favoris, un des rares dotés de foils : le foil est-il l’avenir des Minis ?
Je suis assez dubitatif sur les foils en Mini. On voit des magnifiques photos des bateaux à foils quand ils décollent, sauf que c’est à chaque fois sur des plans d’eau abrités, ce qui n’arrive pas en pleine mer, on a rarement une grande houle classique, plutôt des mers croisées. Donc je ne vois pas un bateau de 6,50 mètres voler beaucoup. J’ai discuté avec Tanguy après les Sables-Les Açores en Baie de Morlaix l’année dernière, il me disait qu’en tout et pour tout, sur les trois étapes, il n’avait vraiment foilé que pendant six heures…

Photo : Christophe Breschi

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