Ocean Fifty

Hélène Noesmoen : “Je veux être aux avant-postes en 2026”

7e des Jeux olympiques de Paris 2024 en iQFoil, Hélène Noesmoen ne participe pas cette année au championnat du monde de la spécialité qui débute ce vendredi à Aarhus. La Sablaise de 32 ans a en effet choisi de prendre le temps de relancer un projet olympique, elle en a également profité pour naviguer sur Koesio, vainqueur le week-end dernier de l’Act 2 des Ocean Fifty Series à Concarneau.

Que gardes-tu de ta préparation olympique pour les Jeux de Paris et de la compétition elle-même ?
La campagne a été particulière, parce qu’avec le changement de support [l’iQFoil a remplacé la RS:X, NDLR], là où, habituellement, une olympiade démarre tranquillement la première année avant trois ans à bloc, on a vécu quatre années à fond à partir du moment où on a reçu le matériel, à la sortie du premier confinement. La réalité de l’olympisme, c’est qu’il faut être capable de remettre une couche un peu plus tous les ans, et je pense que personnellement, j’étais partie trop fort pour être capable de tenir ce rythme. J’ai réussi sur la fin, je suis vraiment super contente de ma préparation finale, mais sur les quatre ans, c’était difficile. Pour ce qui est des Jeux en eux-mêmes, il a manqué les petits trucs qui font la différence, je savais qu’avec le format de la compétition, ça allait se jouer sur une manche ou deux, j’ai fait un peu trop d’erreurs et on sait que dans le sport de haut niveau, il faut que tout s’aligne. Maintenant, si je fais le bilan global, je retiens du positif à 95%.

Quelles leçons en as-tu retenues ? Que tu étais partie trop vite trop fort ?
Oui, sûrement, mais ça aurait été difficile de faire autrement : quand tu as du nouveau matériel et tout à apprendre, tu as très envie d’y aller fort dès le début, mais c’est sûr que ce n’était pas une olympiade en gestion. Il y a des choses que je ne veux pas reproduire, je pense que j’ai fait trop de compétitions, je n’étais pas loin d’exploser par exemple en 2022, il y a aussi eu des gaps techniques chez les concurrentes qu’on n’a pas vu venir. Maintenant, je me dis que si je suis capable de progresser pendant les trois ans qui viennent et de refaire la même préparation finale, il y a une bonne chance de médaille au bout.

Ça veut dire que tu as vite fait le choix de remettre ça ?
J’avais décidé avant les Jeux, déjà pour ne pas passer ces Jeux à me demander si c’était ma dernière semaine de planche, ensuite, parce que j’avais l’impression de ne pas avoir fait le tour du support, j’ai appris énormément de choses les quatre derniers mois. Ce qui a instillé un peu de doute, c’est que j’avais l’impression d’être très satisfaite sur pas mal de points, et qu’à la fin, il n’y a pas eu de médaille, donc je me suis demandé si j’allais réussir à trouver comment faire mieux, il y a eu un peu de remise en question, mais l’idée de fond n’a pas bougé.

“Je n’ai trouvé
que 15% de mon budget”

Alors, comment faire mieux ?
L’idée était déjà de faire une pause cette année, pas une vraie pause, mais plus un moment pour lancer le projet, chercher des partenaires, gérer le staff, car c’est toujours dur de gérer le projet sportif dans son ensemble tout en naviguant, ça m’avait pas mal pesé sur l’olympiade d’avant. Donc ma priorité était de ficeler tout ça avant de me lancer à fond dans la navigation, je me suis donné six mois.

Tu as réussi ?
Malheureusement non, ça n’a pas trop marché, puisque je n’ai trouvé que 15% de mon budget. Pendant les Jeux, tout le monde disait que c’était magique et qu’on ne voulait pas que ça s’arrête, même quelques mois après, mais au moment de signer pour un budget, il n’y a plus trop eu de réponses. C’est dur, parce que je pensais que ces Jeux allaient être un tournant et que les entreprises allaient comprendre que pour performer, ce n’est pas seulement la dernière année qu’il faut investir, mais trois ou quatre ans avant. La réalité, c’est qu’il y a moins d’argent public, beaucoup moins de sponsors privés, l’après-Jeux est hyper compliqué. Maintenant, je me suis bien vidé la tête pendant ces six mois, j’avais dit que je reprendrais le 1er juillet, ça y est, depuis trois jours, je suis à 100% dédiée à mon projet planche à voile.

De quel budget parles-tu ?
Il y a deux budgets, le premier, quand tu as un entraîneur fédéral, tourne autour de 100 000-120 000 euros par an, le second quand tu dois payer un entraîneur, se monte à 200 000 euros. Je suis dans ce deuxième cas, car même si je suis en équipe de France, je ne voulais pas faire le Mondial cette année en juillet, ce qui me prive du soutien fédéral car je ne respecte pas le calendrier. Mais pour moi, ce n’était pas du tout envisageable, je voulais faire un vrai break, j’avais l’impression que si je reprenais trop vite, j’allais me tromper d’objectif.

“J’adore les Ocean Fifty”

Quel est ton programme de reprise ?
Pour l’instant, je travaille au pôle de Brest où il y a une belle dynamique et à partir du 20 juillet, je serai à Los Angeles, où je vais m’entraîner avec la Mexicaine Mariana Aguilar, ma partenaire d’entraînement pour cet été, puis avec Emma Wilson, la meilleure du moment en IQFoil, et sa partenaire Islay (Watson). J’ai décidé de financer ça sur mes fonds propres, parce que je voulais aller naviguer là-bas sur la période correspondant à celle des Jeux, c’est pour moi hyper important de savoir à quoi il faut s’entraîner. Le Championnat d’Europe fin novembre en Sicile sera mon objectif de reprise, sachant que je veux être aux avant-postes en 2026.

Tu as navigué ces derniers temps en Ocean Fifty sur Koesio, raconte-nous comment ça s’est fait ?
J’adore ces bateaux, j’avais contacté des teams l’année dernière pour faire le convoyage retour de la Méditerranée, ça n’avait pas pu se faire pour des questions d’agenda, j’avais quand même réussi à naviguer un peu avec Luke Berry en novembre. Quand le calendrier de cette saison est tombé, je n’ai contacté personne parce que j’avais peur que ce soit trop chargé avant de reprendre l’iQfoil, et finalement, c’est Erwan qui m’a appelée, je me suis alors dit que je ne pouvais pas refuser une opportunité pareille et j’ai fait de la place dans le planning.

Et quel est le bilan de ces quelques semaines, avec à la clé deux victoires sur les Acts 1 et 2 des Ocean Fifty Series ?
C’était une super expérience ! Je n’avais pas mesuré l’intérêt sportif qu’Erwan portait à ces compétitions, je pensais que c’était un peu secondaire, mais pas pour lui, il aime ça. Du coup, on a fait des stages d’entraînement qui m’ont permis de bien comprendre comment le bateau marchait, de faire des erreurs pour ne pas les reproduire en course, je ne m’attendais pas à ce que soit aussi riche. L’ambiance à bord était en plus incroyable, avec du sérieux et l’envie de bien faire, tout en mettant le plaisir en avant. Je suis hyper reconnaissante qu’Erwan m’ait fait une place à bord et que l’équipage m’ait mis dans les meilleures dispositions pour que ça marche à mon poste de tacticienne. Ce qui est sûr, c’est que si on m’invite de nouveau à naviguer sur de beaux bateaux, j’essaierai d’y aller, parce que ça fait du bien de débrancher de temps en temps de nos projets dans lesquels on est vraiment impliqué à 100%. Et il y a plein de transferts à faire entre les supports.

Photo : Alexis Courcoux / ocean Fifty Series

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