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Route du Rhum : le débrief en Class40

La Route du Rhum-Destination Guadeloupe a livré son verdict en Class40 avec la deuxième victoire consécutive de Yoann Richomme devant Ambrogio Beccaria et Corentin Douguet. Tip & Shaft revient sur cette 12e édition avec plusieurs experts : le navigateur Achille Nebout, les entraîneurs Tanguy Leglatin et Erwan Tabarly, les architectes Sam Manuard, Eric Levet (Lombard Yacht Design) et David Raison, ainsi que Tanguy Bourroulec (chantier Structures).

 

La démonstration de Yoann Richomme

 

Tenant du titre, Yoann Richomme a réussi un doublé consécutif dans la même classe que seuls trois marins étaient jusqu’ici parvenus à réaliser avant lui, Laurent Bourgnon (Orma), Franck-Yves Escoffier (Multi50) et Roland Jourdain (Imoca). Et ce alors même qu’il a écopé d’une pénalité de quatre heures d’entrée de jeu pour avoir volé le départ. “J’ai été impressionné par sa remontada, il allait vite et droit tout le temps. J’ai rarement été autant bluffé, il a plié le match, résume David Raison.

“Le fait de s’être arrêté au début l’a fait redoubler d’engagement, il a eu d’entrée un rythme très élevé parce qu’il avait des milles à récupérer, il m’a scotché”, admire également Erwan Tabarly. Tanguy Leglartin ajoute : Il a vraiment attaqué dans les deux premiers fronts par rapport aux autres, qui sont sans doute passés sous J2, là où lui a dû rester sous J1, son niveau d’engagement a fait la différence.

“Yoann a eu une façon de naviguer dans les fronts assez dingue, avec tout dessus jusqu’à 26 nœuds de vent, ce que peu de marins font”, confirme Eric Levet, rejoint par Achille Nebout : “J’ai l’impression qu’au près dans beaucoup de mer, il vaut mieux être assez gîté et bourriner plutôt que d’être à plat en mettant moins de voilure, où ça tape plus et où tu as plus de chance de casser. Le fait que Yoann ne casse rien sur son bateau a aussi fait la différence. Ambrogio (Becccaria), Corentin (Douguet), Xavier (Macaire) ont eu des petits soucis techniques, lui quasiment rien.”

Cette gestion, entre attaque et préservation, est aussi mise en avant par Tanguy Bouroullec : Il fallait savoir écouter son bateau, être capable à certains moments de lever le pied un peu, ce qu’a bien fait Yoann.” Tanguy Leglatin confirme : “Yoann a su ménager sa monture au moment du troisième front, et derrière, il a remis de l’énergie ce qui lui a permis de créer un petit écart qui s’est transformé en 100 milles assez rapidement.”

 

La confirmation Ambrogio Beccaria

 

Derrière Yoann Richomme, si la place sur le podium de Corentin Douguet (troisième), victime de problèmes avec son moteur qui l’ont handicapé, était attendue, celle d’Ambrogio Beccaria, deuxième, l’était moins, même si nos experts ne tarissent pas d’éloges sur l’Italien, vainqueur de la Mini Transat en série en 2019 et qui a terminé sur le podium des quatre courses qu’il a disputées en Class40 !

“Que ce soit en Mini, en Figaro ou en Class40, il n’y a pas une régate où ça ne marche pas, il a vraiment du talent”, constate Erwan Tabarly. Ambrogio est un extraterrestre, tu le mets sur une brouette, il finit devant quand même”, admire David Raison qui tient à préciser : “Le bateau de Gianluca (Guelfi, l’architecte) semble en plus bien né.” Quant à Achille Nebout, il ajoute : “J’ai eu la chance de naviguer deux fois en Figaro avec Ambrogio, j’ai été impressionné par l’engagement qu’il met. Il est en plus très complet, performant aussi bien en technique qu’en navigation et en réglages. Ce qui est plus étonnant, c’est qu’il a mis son bateau à l’eau très tard (mi-août), c’est assez impressionnant de voir comment il a réussi à le mettre au point en si peu de temps.”

Dans le top 10, nos experts soulignent également la belle prestation de Simon Koster, quatrième, qui “a préparé son bateau tout seul, avec un petit budget, des voiles qui avaient pour la plupart quatre saisons”, souligne Tanguy Leglatin, mais aussi d’Alberto Bona qui, toujours selon ce dernier, “avait jusqu’ici plutôt subi dans les conditions musclées en Figaro, alors que là, il a réussi à mener son bateau avec de bonnes vitesses.” Achille Nebout cite enfin ” Kito (de Pavant, finalement 11e)le premier sur un non scow et de loin. Il a logiquement pris du retard au début, mais a vraiment été très bon sur le passage des Açores et de la dorsale en dépassant 5-10 bateaux.”

 

Les Lift encore à l’honneur

 

En s’imposant de nouveau à Pointe-à-Pitre sur son Lift V2, évolution en forme de scow du Lift V1 avec lequel il avait gagné en 2018, Yoann Richomme a offert un doublé au cabinet Lombard Yacht Design. Un bateau qui a confirmé son potentiel au près et au reaching, un véritable atout sur ce parcours. “Normalement, l’écart se fait dans ces conditions lors de la première semaine, c’est ce qui s’est passé il y a quatre ans, rebelote cette année”, analyse Eric Levet. Qui note que Paprec Arkéa a aussi su tenir la cadence au portant, parce qu’un effort particulier avait été fait dans ce sens. “Sur le bateau de Yoann, on a essayé de décaler un peu le centre de gravité vers l’arrière pour qu’il soit un peu moins compliqué à mener en VMG descente.”

Peut-on pour autant tirer des conclusions sur la supériorité de certains dessins par rapport à d’autres ? Au final, les performances sont assez prochesrépond Tanguy Bouroullec. Si tu regardes la première semaine, il y a finalement tous les types de bateau devant.” Dont le Pogo S4, sorti du chantier Structures, qui était pourtant présumé moins efficace au près qu’au portant. “On a été hyper impressionnés par la capacité de Xavier Macaire à faire avancer ce bateau au près, alors qu’il semble très compliqué à faire marcher dans ces conditions, ça nous a un peu perturbés”, sourit Eric Levet.

Sam Manuard, qui place deux Mach 4 (Simon Koster et Antoine Carpentier) et deux Mach 5 (Luke Berry et Alberto Bona) dans le top 10, note de son côté : La Route du Rhum est d’abord une course de marins, on l’a encore vu sur cette édition qui a été plus une course d’engagement que de speed-testing, c’est ce qui a été le juge de paix.” Le mot de la fin est pour Tanguy Leglatin : “On aurait mis Yoann sur un Mach 4 ou un Mach 5, je ne suis pas sûr que le résultat aurait été différent.”

Photo : Pierre Bouras

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