The Ocean Race Europe

Le nouveau parcours de The Ocean Race attirera-t-il plus de concurrents ?

Les organisateurs de The Ocean Race ont annoncé le 4 novembre que le départ de la prochaine édition serait décalé d’environ deux mois et que le parcours serait amputé des escales en Chine et Nouvelle-Zélande. Quel est l’objectif de ces modifications ? Permettront-elles d’attirer plus d’équipes Imoca ? Tip & Shaft a mené l’enquête.

 

The Ocean Race 2022/2023, dont le départ d’Alicante devait avoir lieu en début d’automne 2022, s’élancera finalement fin décembre 2022/début janvier 2023″, un nouveau changement de date pour une édition déjà repoussée d’un an en raison de la crise sanitaire.

Celle-ci est encore à l’origine de ce report, comme l’a expliqué à Tip & Shaft le copropriétaire de la course, Johan Salén : “Nous avions deux étapes prévues en Chine et en Nouvelle-Zélande, où est appliquée une politique « zéro Covid », nous n’avons pas aujourd’hui les garanties de faire les escales dans de bonnes conditions. Comme nous avions besoin de boucler le parcours maintenant, nous avons décidé de les supprimer et de faire une étape épique dans le Sud, qui sera l’occasion de célébrer les 50 ans de la Whitbread [la première édition a été courue en 1973/1974, NDLR].” Soit 12 750 milles entre Le Cap et Itajai, la plus longue étape jamais courue sur la course autour du monde en équipage.

Des changements majeurs qui ont pour conséquence de raccourcir la durée totale de la course, d’où le décalage de la date d’environ deux mois : “La suppression des escales du Sud nous faisait arriver trop tôt à Newport, à une époque où il peut encore y avoir de la neige. La seule solution était de partir plus tard, ça permettait également de garder les mêmes dates d’arrivéeset, ce qui est un autre aspect important, de donner la possibilité aux bateaux qui vont courir la Route du Rhum de s’aligner sur The Ocean Race.”

 

Plus de teams
autour de la table

 

Ce qui réjouit Antoine Mermod, président de la classe Imoca : “Le fait de repositionner The Ocean Race en 2022 présente l’avantage que ce deuxième tour du monde tombe pile entre deux Vendée Globe, en revanche, ça posait le problème de la confrontation avec la Route du Rhum, ce qui n’était pas satisfaisant. Cette évolution résout ce problème.” Va-t-elle permettre pour autant à plus de teams Imoca de s’aligner au départ de The Ocean Race ?

A ce jour, ils sont trois à avoir officialisé leur participation : 11th Hour Racing Team, Malizia-Yacht Club de Monaco et une équipe italienne pas encore dévoilée. Offshore Team Germany, vainqueur de The Ocean Race Europe, n’a pas encore bouclé son budget, mais reste confiant, comme l’a indiqué à Tip & Shaft son team manager Jens Kuphal : Nous attendions désespérément l’annonce du parcours final, car nous ne pouvions pas entamer des discussions plus approfondies sans connaître les escales, les dates et donc le budget. La situation a maintenant changé et nous ferons tout notre possible pour être au départ dans un peu plus d’un an.”

Du côté français, aucune équipe n’a encore officialisé sa participation à la course, mais Antoine Mermod sent que les changements annoncés peuvent faire bouger les lignes : “Nous avons organisé une réunion le lendemain au Havre, on avait quand même 10 teams autour de la table, alors qu’on était plutôt 5-6 avant.”

 

Un surcoût à affiner

 

Tip & Shaft a fait le tour du bassin Paul Vatine pour sonder les uns et les autres. Pour certaines équipes, cela ne change rien, The Ocean Race n’était pas au programme et ne le sera pas : “Entre la Route du Rhum avec Apivia 1 et la construction du nouveau bateau, ce n’est pas du tout dans notre créneau”, confirme Jean-Luc Nélias, team manager d’Apivia“Pour nous, c’est trop engageant budgétairement pour qu’on se permette de faire ça”, répond de son côté Ronan Lucas, patron du team Banque Populaire.

Même position chez Fabrice Amedeo : The Ocean Race, c’est trois millions de plus sur deux ans par rapport au budget initial, je ne sens pas mes partenaires y aller.” Ce surcoût, l’organisateur et l’Imoca tentent de le réduire au maximum, la suppression des deux escales chinoises et néo-zélandaises allant dans ce sens : Ça réduit forcément les coûts et d’un point de vue logistique, c’est beaucoup plus simple, car tout va rester en Atlantique”, confirme Johan Salén.

Antoine Mermod ajoute : “On pense que c’est possible de participer à The Ocean Race avec un budget plus bas [que les 3 millions annoncés par Fabrice Amedeo, NDLR], on travaille en tout cas pour le rendre le plus accessible possible sur la partie assistance et logistique, on va essayer de proposer un package commun.”

 

Un timing serré

 

Si l’argument budgétaire est le plus souvent avancé par ceux qui n’ont pas l’intention de participer à The Ocean Race, il n’est pas le seul : Il y a un aspect risque qu’il est hors de question de prendre : le Sud, c’est génial, mais on n’y mène pas un Imoca à cinq de la même manière qu’en solitaire, donc c’est prendre le risque d’avoir de gros soucis techniques alors que la finalité du projet est le Vendée Globe”, analyse Alain Gautier, team manager de MACSF.

Cette préoccupation est partagée par Alan Roura : Il faut faire attention à ne pas mélanger les projets. Dans le cadre d’un projet Vendée Globe, il y a quand même beaucoup de risques de faire The Ocean Race.” Le Suisse fait tout de même partie de ceux qui estiment que les changements annoncés méritent réflexion, même s’il se verrait plutôt mener à plus long terme un projet tourné spécifiquement vers The Ocean Race. Ce qui est également le cas de l’équipe Bureau Vallée, comme le confirme Servane Escoffier, sa team manager : “The Ocean Race est une course dont on rêve, mais c’est compliqué de changer un planning à un an de l’échéance. Pour être très honnête, on regarde plutôt l’édition suivante, avec une vraie volonté d’y aller.”

Team manager d’Initiatives Cœur, David Sineau estime lui aussi le timing serré : “Le nouveau format change un peu la donne, pour les projets avec un bateau neuf qui serait prêt, ça peut être intéressant, on a vu sur le dernier Vendée Globe que beaucoup avaient manqué de navigation dans les mers du Sud. Maintenant, le timing n’est pas évident, parce que les discussions avec nos partenaires ont déjà eu lieu. Je regarde le dossier avec intérêt, mais c’est un peu tard.” Greg Evrard, son homologue chez Corum L’Épargne, ajoute : “The Ocean Race n’était jusqu’ici pas une éventualité pour nous. Maintenant que la course est compatible avec le Rhum, ça mérite qu’on étudie le dossier, même si ce n’est pas évident de partir sur un tour du monde quand tu viens de terminer une Route du Rhum et une année de solo.”

 

“Entre 6 et 10 Imoca”

 

Si la plupart de nos interlocuteurs estiment que les changements annoncés vont dans le bon sens, peu, finalement, semblent prêts à franchir le pas, à l’exception de l’équipe TR Racing dont le directeur exécutif Thomas Gaveriaux raconte : “Depuis un moment, nous sommes pas mal moteurs avec d’autres équipes pour trouver un format de course compatible avec le reste du programme et engager le maximum de participants. Ces changements rendent le champ des possibles un peu plus large.”

L’équipe sera-t-elle pour autant au départ d’Alicante ? “Notre priorité reste la participation de Thomas (Ruyant) au prochain Vendée Globe. Comme il recevra son nouveau bateau début 2023, il va se focaliser dessus ; maintenant, on aimerait bien que le bateau actuel y participe, reste à savoir avec quel montage d’équipage et de partenaires, il y a un travail à effectuer pour optimiser les coûts.”

Beaucoup attendent donc les dates définitives, promises “avant Noël” par Johan Salén, et surtout que les études sur les budgets soient menées à leur terme. Combien d’équipes Imoca seront au départ dans un peu plus d’un an ? Johan Salén évoque “2-3 autres équipes internationales très probables, et, on espère, 2-3 françaises“. A l’Imoca, Antoine Mermod estime quand à lui : “Si on a entre 6 et 10 Imoca et entre 4 et 6 VO65, ce sera une réussite. La course a été beaucoup plus impactée que les autres par le Covid, en plus à un moment où elle se réinventait.”

 

Photo : Sailing Energy / The Ocean Race

Tip & Shaft est le média
expert de la voile de compétition

Course au large

Tip & Shaft décrypte la voile de compétition chaque vendredi, par email :

  • Des articles de fond et des enquêtes exclusives
  • Des interviews en profondeur
  • La rubrique Mercato : l’actu business de la semaine
  • Les résultats complets des courses
  • Des liens vers les meilleurs articles de la presse française et étrangère
* champs obligatoires


🇬🇧 Want to join the international version? Click here 🇬🇧