Comment les partenaires engagés dans la course au large vivent et gèrent au quotidien la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 et la crise économique qui en découle ? Quel est l’impact sur leur activité et sur leur partenariat voile ? Comment voient-ils la suite ? Après Sébastien Petithuguenin, directeur général de Paprec Group, vendredi dernier, c’est au tour de David Giraudeau, celui de La Mie Câline (*), de répondre aux questions de Tip & Shaft.
Vendredi dernier, Sébastien Petithuguenin confiait que face à la situation exceptionnelle traversée par le monde économique aujourd’hui, il jugeait préférable de reporter le Vendée Globe d’un an, quel est votre avis sur la question ?
Aujourd’hui, nous sommes tous dans la même incertitude, c’est très compliqué de tirer des plans sur la comète et je pense qu’il faut y aller par étapes, on est vraiment dans une période où on tente d’apporter des réponses sur des choses concrètes, pas sur des hypothèses. Nous sommes encore un peu loin de l’événement, nous aurons peut-être d’ici fin juin une vision un peu moins dans le brouillard, donc l’idée pour nous, c’est d’être patients. C’est notre deuxième Vendée Globe, cette année correspond aux 35 ans de l’enseigne, nous avons organisé un grand événement autour du départ avec l’invitation de nos 235 magasins aux Sables d’Olonne, nous avons vraiment envie de mettre les petits plats dans les grands, donc pour le moment, on est tournés vers cet objectif. Le premier Vendée Globe, nous nous étions décidés un peu à la va-vite pour aider Arnaud à boucler son budget, c’est un monde qu’on ne connaissait pas, on avait improvisé. Alors qu’aujourd’hui, on a un Vendée Globe, une Route du Rhum et deux Jacques-Vabre derrière nous, on est un peu plus aguerris donc on mise beaucoup sur ce Vendée Globe. Pour tout ce qui se passe après la rentrée [de septembre], notre ligne de conduite est de se dire que ça reste comme ce qu’on avait prévu.
Comment le groupe La Mie Câline est-il impacté par la situation actuelle ?
Nous sommes un groupe qui a un double métier : nous sommes franchiseur, avec un réseau de 235 magasins sur notre territoire national, dont 95% en franchise, donc on travaille avec des commerçants indépendants. Et nous sommes en même temps fournisseur principal de ce réseau, puisque nous sommes un industriel de la boulangerie, nous fabriquons essentiellement pour nos franchisés. Donc l’impact est double : les 190 magasins qui restent ouverts sur les 235 font environ 30% de leur chiffre d’affaires habituel en vendant du pain, mais avec quasiment pas de restauration ni de viennoiserie, ils sont donc obligés d’aller chercher les mesures annoncées par le gouvernement – prêt garanti par la BPI, reports de charges, chômage partiel. Par effet de rebond, notre activité autour de l’industrie est très faible, autour de 20% de ce qu’on fait normalement, nous avons aussi recours au chômage partiel massif, nous avons aussi dû gérer un sur-stock important avec l’arrêt brutal. Donc nous sommes durement touchés financièrement, mais il existe une vraie solidarité entre tous les acteurs qui fait qu’il n’y a pas de tension liée à cette situation complètement incroyable, on se serre les coudes et on essaie de prendre les meilleures décisions possibles. Et même si on sait que le déconfinement annoncé pour le 11 mai sera très partiel, ça reste à nos yeux une étape importante, c’est toujours sympa de monter une marche, même petite.
Dans un tel contexte, le partenariat voile passe-t-il au second plan ou au contraire est-il important de le réaffirmer ?
Une des marques de fabrique de notre entreprise a justement été d’être le plus fidèle possible à ses partenaires, quels qu’ils soient, et la voile en fait partie. Donc si vous me posez la question aujourd’hui, il est hors de question d’imaginer une quelconque annulation du partenariat avec Arnaud. Si dans six mois, on est toujours dans la même galère, peut-être que je vous répondrai différemment parce que ce sera une question de survie, mais aujourd’hui, on est droit dans nos bottes et on va faire ce Vendée Globe avec Arnaud en novembre. Le conte de fées serait qu’on soit alors en pleine renaissance et débarrassés presque totalement de cette épidémie pour que tout se passe comme prévu, avec nos franchisés et nos salariés, ça donnerait à ce Vendée Globe une dimension encore plus forte. Je suis plutôt quelqu’un d’optimiste, donc tant qu’il y a une petite lueur, et aujourd’hui elle n’est pas petite, il faut y croire.
Combien investissez-vous sur ce projet Imoca ?
Nous sommes co-partenaires avec Artipole, à nous deux, nous mettons environ 60% du budget total d’Arnaud. J’ai vu qu’il avait communiqué autour de 950 000 euros annuels dans Ouest-France, donc si vous avez une calculatrice…
Ça fait donc environ 300 000 euros annuels ?
Oui, sachant que chez nous, comme on a un réseau de franchise, on partage ce montant en deux entre les franchisés et le franchiseur. Et les « grandes » années, de Route du Rhum et de Vendée Globe, on ajoute un budget de l’ordre de 150 000 à 200 000 euros pour animer ce partenariat.
(*) La Mie Câline a réalisé en 2019 un chiffre d’affaires de 190 millions d’euros et compte 2200 collaborateurs dans toute la France, dont 300 à son siège social de Saint-Jean-de-Monts.
Photo : Yvan Zedda/La Mie Câline Artipole