La course au large du Vendée Globe pourrait sera soumise aux aléas du covid-19

Où en est le Vendée Globe à deux mois du départ ?

L’organisation du Vendée Globe entre dans la dernière ligne droite avant le départ le 8 novembre prochain. Si, sur le plan sportif, le déroulement en juin de la Vendée-Arctique-Les Sables d’Olonne a rassuré, le contexte sanitaire laisse planer le doute sur les contours définitifs du village, les modalités d’organisation et le règlement final. A deux mois du coup de canon, Tip & Shaft fait le point.

A 65 jours du départ du Vendée Globe, le compte à rebours est lancé pour les équipes, avec, au programme, à partir de mercredi prochain, le Défi Azimut, ultime confrontation sportive, sorte de répétition générale pour les 20 inscrits. “La course va se jouer à huis clos, explique l’organisateur Jean-Marie Corteville. On filtrera l’accès aux pontons tout en essayant de conserver une circulation fluide. Le fait que le Morbihan soit très épargné par le Covid reste une chance dans le contexte actuel.”

Qu’en sera-t-il aux Sables d’Olonne dans six semaines ? En 2016, 1,5 million de visiteurs avaient foulé le village. Combien seront-ils cette année ? Dans quelles conditions pourront-ils approcher les skippers ? Comment les partenaires pourront-ils mener leurs opérations de relations publiques ? Interrogée, la SAEM Vendée, organisatrice du Vendée Globe, n’a pas souhaité répondre à nos questions. Les modalités d’organisation du village ne seront dévoilées que le 17 septembre à Paris lors de la conférence de presse.

PROTOCOLE SANITAIRE STRICT

Selon la note envoyée par la SAEM Vendée cet été aux skippers, que nous avons pu consulter, un protocole sanitaire strict – encore susceptible d’évoluer – comparable à celui du Tour de France cycliste va être mis en place. Trois tests (deux PCR – dont un la veille ou le matin du départ – et un sérologique) sont ainsi prévus pour les skippers, leurs familles et les préparateurs entre le 3 et le 8 novembre. Une période de confinement de 5 jours sera imposée avant le départ et des discussions sont en cours pour le cas particulier des concurrents anglais qui doivent subir une quatorzaine en arrivant en France.

Quid en cas de test positif ? Le concurrent infecté par le virus serait interdit de départ. Si un seul membre de son entourage (team et famille) était touché par le virus, le marin serait bloqué 5 jours avant de pouvoir prendre la mer. L’idée est d’éviter qu’un cas de Covid ne se déclare en mer pendant les premières semaines de course avec des frontières à ouverture variable.

Les concurrents interrogés sur le sujet par Tip & Shaft ne sont pas surpris : “En tant que coureur, je dois mettre toutes les chances de mon côté pour partir, l’enjeu est trop important, résume Charlie Dalin (Apivia). Donc nous allons sans doute aller au-delà des préconisations, notamment pour le confinement d’avant-départ, car les cinq jours prévus n’offrent pas forcément de garantie suffisante.

INCERTITUDES SUR LE VILLAGE

Qu’en sera-t-il de la vie sur le village ? La jauge de 5 000 visiteurs maximum, comme pour tous les rassemblements, est évoquée et une circulation à sens unique avec prise de température à l’entrée et à la sortie, mais rien n’a encore été officialisé.

Face aux incertitudes, plusieurs teams ont renoncé à louer des espaces commerciaux sur le village. C’est le cas de Time for Oceans : “Notre activation repose essentiellement sur les invitations et le partage avec le public. Nous n’avons donc pas loué d’espace, explique le skipper Stéphane Le Diraison. Il va falloir apprendre à partager ce que représente une avant-course via le digital. On sait le faire en mer, alors pourquoi pas à terre ?

De son côté Maxime Sorel (V and B – Mayenne) temporise : “C’est sûr que ce n’est pas simple pour les organisateurs, mais ils jouent un peu au chat et à la souris. Nous devions payer cette semaine la deuxième tranche de notre location d’espace. On attend des informations et si nous devons perdre l’acompte, tant pis, on conservera notre budget pour de la communication par d’autres canaux”. Team manager de LinkedOut, Marcus Hutchinson, fait aussi ses comptes, fataliste : “Nous avons loué une loge VIP au tarif normal. 17 personnes assises ou 23 debout y sont autorisées. Il y a quatre ans, on rentrait trois fois plus de monde dans ces 50 m2. Mais c’est comme ça, il faut s’adapter…”

LA FLOTTE AU COMPLET

Les candidats au Vendée Globe avaient jusqu’au 1er septembre pour finaliser leur dossier d’inscription et boucler leur qualification. Ce sont donc finalement 33 candidats (depuis le retrait d’Erik Nigon qui a prêté son bateau à Clément Giraud) qui sont formellement inscrits.

Armel Tripon, qui a achevé jeudi son parcours de “substitution” suite à son abandon sur la Vendée-Arctique pour des problèmes de structure, s’est dit “rassuré par ces 2 000 milles. C’est vrai qu’on avait été un peu optimiste sur certains échantillonnages et nous avons renforcé le fond de coque bien au-delà de la zone accidentée. J’aimerais bien quand même reprendre un front avant le départ, mais on verra bien…

Sébastien Destremau (MERCI), qui a connu un souci de gréement lors de sa qualification de 2 000 milles, en a fini jeudi lui aussi avec le parcours de 1 000 milles supplémentaire imposé par la direction de course, tandis que Sébastien Simon et Didac Costa ont aussi validé leur qualification. “La flotte semble prête, résume Jacques Caraës le directeur de course du Vendée Globe. Même si j’ai quand même des interrogations sur les bateaux jeunes et sur la tenue des nouveaux foilers dans la mer très forte au portant…

COURSE CONTRE LA MONTRE

En dehors du Défi Azimut, il ne reste, selon la plupart des skippers, pas plus d’une dizaine de jours d’entraînement envisageables avant de rejoindre les Sables d’Olonne le vendredi 16 octobre au plus tard – parfois moins lorsque les sorties RP sont au programme. “Depuis le Covid, tout le monde est passé en mode rétro-planning permanent !“,  s’exclame Marcus Hutchinson, rentré cette semaine d’Italie où il est allé chercher chez Persico les foils V2 que LinkedOut devrait étrenner sur le Défi Azimut.

Le peu de temps restant sera occupé par certains à mettre leur bateau en configuration définitive. C’est le cas de Sébastien Simon qui espère en avoir fini “avec le mauvais sort qui [le] poursuit depuis le début de [son] projet. Naviguer sur les 2 000 milles de qualif’ m’a fait beaucoup de bien, j’étais heureux à bord, à ma place”, nous a-t-il confié.

Le dossier des foils d’Arkea Paprec reste néanmoins ouvert : une nouvelle paire de même forme que la V2 a été mise en fabrication chez Persico en Italie. Elle sera livrée en France quelques jours avant le 15 octobre, date limite pour présenter un certificat de jauge définitif. Arkea Paprec a donc été à nouveau jaugé avec ses foils V2 renforcés, une précaution qui permettrait, en cas de retard de livraison, de ne faire qu’un “rebouclage” numérique du calcul de stabilité avec les nouveaux foils.

LES INCONNUES HUGO BOSS ET CORUM

D’autres concurrents doivent encore finir de découvrir une nouvelle version de leur machine, comme Stéphane Le Diraison. Son Time for Oceans a connu un chantier de six mois avec implantation de foils, création d’un nouveau rouf, changement des ballasts et installation de nouveaux safrans. “L’idée est d’aller jouer avec V&B-Mayenne et Banque Populaire qui sont un cran au-dessus de nous, explique le skipper. Il faut hisser son niveau de jeu car même sur les bateaux d’ancienne génération, personne ne t’attend !

Sur les autres 60 pieds, les chantiers d’été ont parfois été mis à profit pour optimiser encore – comme sur Apivia, qui a raboté son brion pour mieux spatuler l’étrave, suivant le mouvement de Charal, Arkea Paprec ou Sea Explorer – Yacht Club de Monaco. Mais les maîtres-mots ont été vérification et, parfois, renforcement structurel – avec nouvelle jauge à la clef.

Restent deux inconnues dans le haut du tableau : Alex Thomson (Hugo Boss), qui a renoncé au Défi Azimut et continue à se préparer seul, et Nicolas Troussel (Corum L’Épargne), lui aussi absent du rendez-vous lorientais la semaine prochaine, qui franchira sa première ligne de départ… aux Sables d’Olonne. C’est vrai que notre préparation est auto-centrée, mais nous regardons ce qui se passe ailleurs, assure Greg Evrard, le manager de l’équipe. La préparation d’un tour du monde en solitaire dans le cadre d’un projet tardif comme le nôtre passe par des navigations longues et pas forcément par le tour de Groix.”

Photo : François Van Malleghem/Imoca

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