Joschke

Stéphane Dessirier (MACSF) : “Incarner notre groupe à travers une femme est très important”

Après une première campagne avec Bertrand de Broc (2015-2017), MACSF a annoncé fin décembre son retour sur le circuit Imoca, avec le Vendée Globe en perspective, aux côtés d’Isabelle Joschke. Directeur général du groupe MACSF, Stéphane Dessirier explique à Tip & Shaft les raisons de ce nouvel engagement.

Quel bilan avez-vous fait de votre précédente expérience avec Bertrand de Broc ?
D’abord, ce n’était pas pour nous une première, puisque nous avons un historique avec la voile qui remonte à quarante ans, nous avons commencé le sponsoring avec Olivier Moussy il y a très longtemps, nous avons poursuivi avec Bertrand sur un projet qui était de faire naviguer des personnes en situation de handicap sur son grand catamaran. Nous nous sommes ensuite en effet lancés en Imoca pour une première expérience de trois ans. Nous avons beaucoup appris pendant ces trois années, nous avons mieux compris l’économie de la course au large et tout ce que pouvait nous apporter un tel projet en termes d’image et de retombées médiatiques. Après, c’était un petit budget pour l’Imoca, de l’ordre d’un million d’euros par an sur trois années ; l’objectif n’était pas de gagner la course mais d’emmener nos sociétaires vers ce monde de la course au large, sachant que les professionnels de la santé ont une forte appétence pour la voile, beaucoup naviguent et ont un bateau. Ça a donc été pour nous un apprentissage et une belle expérience, puisque Bertrand est quelqu’un qui communique de façon très simple et très directe, ça nous a permis de mieux appréhender ce milieu.

Avez-vous pu mesurer les retombées de ce partenariat ?
Même si personnellement, je suis très prudent avec ces chiffres, nous avons effectivement fait des calculs savants, l’équivalent en retombées médias est de 7,5 millions d’euros sur la durée du partenariat. C’est donc un investissement qu’on peut considérer comme rentable, puisque nous avons mis à peu près 3 millions d’euros.

Cette histoire s’est terminée sur un abandon de Bertrand de Broc puis la fin du partenariat avec lui, cela vous a-t-il laissé sur votre faim ?
Nous étions bien sûr extrêmement déçus qu’il s’arrête, mais le gros des retombées médiatiques sur le Vendée Globe se fait avant la course, pas beaucoup pendant, d’autant que nous n’imaginions pas un instant gagner le Vendée Globe. Nous avons donc été globalement plutôt contents, nous avons quand même eu trois belles années avec Bertrand. Après, sur la fin, ça a été un peu compliqué, parce que nous ne savions pas très bien ce qu’il voulait faire et finalement, il a vendu son bateau à Alan Roura, donc le partenariat s’est arrêté de fait. Je ne sais pas s’il voulait vraiment continuer à faire du large, il était sans doute moins motivé qu’il ne l’avait été. Donc lui comme nous, on s’est dit que c’était bien d’arrêter là.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de remettre ça sur le Vendée Globe suivant ?
Nous avons d’abord fait une pause d’un an, histoire de laisser reposer tout ça et de faire le bilan. Nous avons par la suite été pas mal sollicités puisque nous étions identifiés comme un sponsor potentiel pour un projet nautique. Nous avons rencontré quelques équipes et quelques skippers, dont certains nous ont présenté des projets vraiment intéressants, je pense par exemple à Michel Desjoyeaux et Paul Meilhat. Mais comme ce sont des gens qui veulent gagner et mettre toutes les chances de leurs côtés avec un bateau neuf, les budgets étaient très élevés par rapport à nos moyens. Nous sommes un petit groupe d’assurance, certes prospère, mais avec quand même des contraintes budgétaires assez fortes, il faut rester raisonnable. Notre idée, encore une fois, ce n’est pas forcément la gagne, c’est de participer, de raconter de belles histoires. Finalement, par l’intermédiaire d’Eric Lombard, qui dirigeait le groupe Generali et que je connais bien [désormais patron de la Caisse des dépôts et consignations, NDLR], nous avons rencontré Alain Gautier et Isabelle Joschke qui nous ont présenté un projet extrêmement raisonnable, puisque nous sommes sur un budget de 1,6 million d’euros annuels pendant trois ans alors que pour un projet gagnant, c’est entre 4 et 4,5 millions.

Ils ne sont sans doute pas les seuls à vous avoir présenté un « projet raisonnable », qu’est-ce qui a fait pencher la balance en leur faveur ?
Un élément qui a aussi joué, on ne va pas le cacher, c’est qu’Isabelle est une femme. Or, nous avons 70% de nos clients qui sont des femmes, et nous avons à peu près la même proportion de femmes dans nos équipes. Pour nous, incarner notre groupe à travers une femme est quelque chose d’extrêmement important, et en plus, une femme engagée puisqu’Isabelle a créé l’association Horizon Mixité.

Avez-vous étudié d’autres supports que l’Imoca ?
Nous n’avons pas étudié les Ultimes, parce que même si c’est passionnant, les budgets sont trop élevés pour nous, et pour les plus petits bateaux, il y a moins de retombées médiatiques, donc le bon compromis pour nous, c’est quand même l’Imoca avec le Vendée Globe qui a une aura extraordinaire. Ça correspond à la fois à ce qu’on veut faire en termes d’image et à nos budgets.

Vous dites que vous ne visez pas forcément la gagne, vos objectifs sportifs sont-ils tout de même revus à la hausse par rapport à votre précédente campagne ? 
Oui, nettement, parce que nous allons investir pour améliorer le bateau avec des foils qui vont être installés dès cette année sur un 60 pieds qui est quand même un très bon bateau puisque c’est le même que PRB qui a gagné pas mal de courses. Nous pensons que c’est un très bel outil et que nous allons devenir plus compétitifs. Nos ambitions sont donc plus fortes que celles que nous avions avec Bertrand dont le bateau commençait à être un peu dépassé, parce que quand nous avons signé le partenariat [en 2015, NDLR], la génération des bateaux à foils arrivait. Maintenant, il faut qu’Isabelle apprenne à utiliser ce bateau qui sera très différent de la version sans foils.


Foils : décision imminente. Team manager du projet MACSF, Alain Gautier explique, à propos du passage de l’Imoca d’Isabelle Joschke à une version à foils : Le dossier n’est pas simple, à la fois pour des questions budgétaires et de timing. Construction de foils neufs ou achat d’un jeu existant, nous étudions les deux solutions, tout comme nous discutons avec plusieurs chantiers et plusieurs architectes, ceux du bateau (VPLP et Guillaume Verdier), mais aussi, si nous optons pour des foils d’occasion, celui qui les a dessinés. Nous sommes vraiment dans la dernière ligne droite, la décision est imminente“.

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