Hublot nouvel Imoca d'Alan Roura

Vendée Globe : la course aux partenaires bat son plein

Hublot (Alan Roura), Biotherm (Paul Meilhat), Guyot Environnement (Benjamin Dutreux), Freelance.com(Guirec Soudée)…, plusieurs nouveaux sponsors ont annoncé ces deux dernières semaines leur arrivée sur le circuit Imoca avec le prochain Vendée Globe dans le viseur. Pour d’autres skippers, la quête continue.

Plus d’un an après l’arrivée d’une neuvième édition du Vendée Globe de tous les records (33 partants, 25 à l’arrivée), la dixième attise encore plus de convoitises. Sur la quarantaine de skippers qui ont fait part formellement de leur intention d’y participer, au moins 38 d’entre eux disposent d’ores et déjà un bateau existant ou en construction.

Par rapport aux éditions précédentes, le taux de renouvellement – 44% entre 2016 et 2020, 50% entre 2012 et 2016 – est beaucoup plus important : ils sont aujourd’hui 22 sur les 33 partants de novembre 2020, soit 66%, à d’ores et déjà disposer du budget et du bateau pour remettre ça. Seuls 3 marins ont jusqu’ici formellement annoncé qu’ils ne seraient pas au départ le 10 novembre 2024 : Alexia Barrier, Ari Huusela et Alex Thomson.

Des marins auxquels il faut ajouter Stéphane Le Diraison, qui le révèle à Tip & Shaft : “Je n’ai pas été dans un bon enchaînement : j’ai d’abord voulu construire un bateau neuf, mais ça n’a pas pu se faire, ensuite, je me suis fait dépasser par la vitesse à laquelle les autres projets ont été lancés, si bien que quand j’ai voulu racheter un bateau d’occasion, il ne restait plus qu’Arkéa Paprec qui ne correspondait pas à ce que je recherchais. J’ai donc décidé de renoncer au prochain Vendée Globe et de revenir à partir de 2023 en Class40 avec un projet d’éco-conception.”

“Le fait qu’ils soient autant à repartir en campagne sur le Vendée Globe montre que leurs projets sont viables et intéressants pour leurs partenaires car, en grande majorité, ils repartent avec les mêmes sponsors”, commente Antoine Mermod, président de l’Imoca. D’après lui, 30 partenaires majeurs déjà présents sur l’édition 2020 ont rempilé. 9 des 22 marins récidivistes disposeront d’un bateau neuf. Preuve de l’engagement au moins égal, si ce n’est plus important, de leurs partenaires.

16 nouveaux partenaires

L’Imoca a recensé 16 nouveaux partenaires arrivés sur le circuit depuis 2021, dont certains d’envergure internationale. L’Américain Fortinet (Romain Attanasio), le Français Nexans (Fabrice Amedeo), la banque privée suisse EFG (Boris Herrmann), l’armateur allemand Alva Yachts (Jörg Riechers) ont par exemple été rejoints ces dernières semaines par Hublot, filiale du groupe LVMH (Alan Roura) et par Biotherm, filiale de L’Oréal (Paul Meilhat). “Nous assistons à un changement de spectre dans la classe, souligne Paul Meilhat. Des groupes se rendent compte de l’opportunité d’un tel support de communication à l’étranger. Alan Roura ajoute : “Même si ce sont des entreprises de taille conséquente, elles réalisent qu’en termes de budget, l’investissement n’est pas aussi onéreux que dans d’autres disciplines.”

Son partenaire Hublot, qui a accompagné par le passé un autre Suisse, Dominique Wavre, n’est pas complètement nouveau dans le sponsoring voile, tout comme Biotherm qui, dans les années 1980, avait soutenu Florence Arthaud. Notre engagement n’est pas le fruit du hasard : la marque revient 40 ans après et l’année de son 70e anniversaire, explique Grégoire Benoit, directeur général de Biotherm. Cet univers fait partie de notre histoire et cela fait écho à nos engagements depuis plus de dix ans pour la préservation des océans.”

Des acteurs français
aux motivations différentes

L’arrivée de grandes marques n’empêche pas des PME d’investir en Imoca, à l’instar de Guyot Environnement, présent depuis 2014 en Figaro, et qui a annoncé la semaine dernière son engagement auprès de Benjamin Dutreux. C’est un projet qu’on mûrit depuis 2018, on étudiait la bonne manière de nous engager en Imoca. Figurer dans la catégorie reine d’une discipline avec une entreprise créée par mes parents il y a 40 ans, c’est une fierté”, raconte Erwan Guyot, le PDG. Qui précise avoir “multiplié par 6 ou 7” son investissement dans la voile. S’il est rare de voir une entreprise passer ainsi d’un projet Figaro à l’Imoca, Erwan Guyot assure que “cela va donner envie à d’autres PME bretonnes, impliquées en Figaro, de franchir le pas.”

De son côté, l’agence de communication Altavia, mécène d’Éric Bellion en 2016-2017, revient avec le même skipper. “Ce n’est pas un partenaire mais un associé, explique le marin. L’idée serait de constituer un collectif d’entreprises autour de nos valeurs communes.” Comme il l’indiquait dans notre podcast Pos. Report du 22 mars, le 9e Vendée Globe 2016-2017 a pour ambition de mutualiser son projet (environ 1,5 million d’euros de budget annuel), mais aussi les partenaires, avec d’autres marins, comme Martin Le Pape (voir l’interview ci-dessous). Avec, pour objectif, la construction de 5 bateaux identiques, simples et sans foils.

Pour Freelance.com, la course au large est en revanche une grande découverte. L’entreprise (672 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021) s’est associée pour cinq ans à l’aventurier Guirec Soudée, qui a acquis l’ex Omia-Water Family. “Nous n’avions jamais fait de sponsoring sportif et nous n’en avions pas la volonté, explique Claude Tempe, son vice-président. Mais la rencontre avec Guirec a tout changé. On s’est reconnus dans sa démarche, les parallèles sont nombreux entre sa façon d’évoluer et la manière dont nous développons notre entreprise. C’est un partenariat spontané qui n’avait rien de prémédité.” Freelance.com finance le projet à hauteur de 80%, le skipper cherche d’autres sponsors pour compléter son budget que le partenaire principal ne souhaite pas dévoiler.

Le bateau avant,
les sponsors ensuite

Pour d’autres skippers, l’heure est également encore à la prospection. Et la plupart ont la même stratégie : convaincre des entreprises après avoir acquis un bateau, comme a pu le faire Benjamin Dutreux qui a pris le risque d’acheter l’ex 11th Hour Racing (l’ex Hugo Boss du Vendée Globe 2016) avant de signer avec Guyot Environnement. C’est le cas, aussi, de Benjamin Ferré, qui a acheté l’ex Banque Populaire X, de Tanguy Le Turquais (ex Groupe Apicil), de Sébastien Marsset (ex Compagnie du Lit), du Suisse Ollie Heer (ex Pure Best Western), de l’Anglais James Harayda (ex Time for Oceans) et de Conrad Colman (ex V and B-Mayenne). “Le marché de l’Imoca est tellement tendu que l’urgence, c’était d’acquérir un bateau”, explique Tanguy Le Turquais, qui se donne encore trois mois pour trouver un partenaire. Il espère 500 000€ pour cette saison avec une participation à la Route du Rhum, puis 2,5 millions d’euros jusqu’au Vendée Globe.

Benjamin Ferré, lui, dispose déjà d’un partenaire principal – “une entreprise familiale centenaire” qui sera annoncée fin mai – et cherche des co-sponsors pour un budget total de 1,5 million d’euros. Blablacar a un temps été intéressé avant de jeter l’éponge à cause de la crise en Ukraine, une partie de son activité étant en Europe de l’Est. “Avec le Covid et surtout la guerre en Ukraine, nous savons que ce type de budget est le premier coupé par les entreprises, ce qui ne facilite pas nos recherches”, commente d’ailleurs Conrad Colman qui se dit “inquiet”, lui qui espère réunir 1 million d’euros par an jusqu’au Vendée Globe. Ollie Heer, ancien boat captain d’Alex Thomson, vise quant à lui un budget de 4,5 millions d’euros jusqu’en 2025 et cible en priorité des entreprises suisses. L’Anglais James Harayda propose un ticket d’entrée à 500 000 euros pour un sponsor titre, Sébastien Marsset, qui cherche environ 550 000 euros annuels, souhaite réunir des sponsors au sein d’un club d’entreprises, Cap Agir Ensemble.

Compte tenu du nombre de candidats au Vendée Globe, cette quête de partenaires se heurte parfois à un obstacle de taille, celui de n’avoir à ce jour pas la garantie d’être au départ dans deux ans et demi, si le nombre de projets dépasse la limite des 40 fixée par la SAEM Vendée. “C’est un challenge stressant et difficile à expliquer”, concède Ollie Heer. Chez Freelance.com, partenaire de Guirec Soudée, Claude Tempe veut le voir comme une opportunité : “Il faut essayer, y croire et être motivé jusqu’au bout. C’est l’état d’esprit constant d’un entrepreneur et d’un marin de se battre en sachant que rien n’est gagné.”

Photo : Vincent Curutchet

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