Jérémie Mion et Cédric Chateau

Jérémie Mion : “On ne s’attendait pas au podium !”

Après des Jeux de Tokyo dont il est sorti déçu (11e en 470 avec Kevin Peponnet), Jérémie Mion s’est consolé en prenant avec Cédric Chateau la 3e place de la Transat Jacques Vabre, à bord d’un Pogo S4 mis à l’eau l’été dernier, Seafrigo-Sogestran. Une première expérience au large pour le futur coéquipier de Camille Lecointre, qui, depuis la Martinique, a répondu aux questions de Tip & Shaft.

 

► Cette troisième place est-elle au-delà de vos espérances ?
Avant le départ, vu le nombre de bateaux et le plateau, plus le fait que c’était notre première transat ensemble, la toute première pour moi, on s’était dit qu’on serait dans nos clous en faisant un top 10 et qu’un top 5 serait un excellent résultat, donc clairement, on ne s’y attendait pas !

► A partir de quand ce podium est-il devenu un objectif ?
On a eu un début compliqué, la mise en jambes a été difficile pour moi, il y avait de l’émotion, beaucoup de choses à découvrir, on n’avait eu que deux semaines d’entraînement avant le départ, dont la qualification. Finalement, on a réussi un gros come-back avant le Cap Vert, et à partir de ce moment-là, comme on était à portée de tout le monde, on s’est dit qu’il fallait essayer de grappiller les places les unes après les autres.

► Avez-vous dû, alors, hausser le rythme ?
Clairement ! Quand on a vu que le podium était possible, on a tout donné. Il y a des moments où on voyait qu’il fallait barrer, être à deux sur le pont, tout le temps aux réglages, trouver des solutions quand ça avançait moins vite, c’était très intense, on a vraiment élevé notre niveau de jeu dans la deuxième partie de transat. D’autant qu’on a eu des soucis à la fin : comme on n’avait plus d’essence, on a dû couper toute l’électronique deux jours avant l’arrivée, si bien qu’on ne voyait plus les positions des adversaires. On a aussi explosé notre grand spi, un coup dur parce qu’on était à la bataille avec Banque du Léman. On s’est alors dit que le podium était mort, mais on n’a rien lâché et on a retrouvé nos moyens de communication la dernière nuit, ce qui nous a permis d’être précis sur le placement par rapport à Volvo.

 

“La même chose qu’en 470,
mais en plus long”

 

► Le bateau a semblé très rapide, tu confirmes ?
C’est clair qu’il est rapide, notamment dans le créneau de 15 nœuds où il a un super potentiel. Après, pas mal de gens nous ont dit qu’on avait transpercé la flotte, mais j’ai trouvé que les autres bateaux allaient aussi très vite, quand on était côte à côte, on n’est jamais passés par dessus les autres. C’était plus parce qu’on faisait les bons décalages, qu’on était dessus tout le temps.

► C’était ta première course au large, ça t’a plu ?
Oui, carrément ! Tout ce qui m’inquiétait, le mal de mer, le sommeil, j’ai eu zéro souci et finalement, je me suis rendu compte que c’était la même chose que sur un 470, mais en plus long, avec beaucoup de placement et la nécessité de s’investir sans arrêt pour bien faire avancer le bateau. Après, il faut reconnaître que les conditions étaient idéales pour découvrir le large : je n’ai pas vécu de tempête, on ne s’est pas fait peur, je suis loin de me dire que je maîtrise le sujet.

► Quelle va être la suite de ce projet Class40 ?
L’ambition était de se lancer sur deux Jacques Vabre pour se former et apprendre lors de la première puis essayer d’être performants sur la suivante, mais on a mis la barre haute ! Il faut rester humbles, on a encore beaucoup de choses à apprendre et j’espère bien renaviguer en Class40 d’ici le mois de juin puis en 2023. Comme on était sur la location d’un bateau (qui appartient à François-René Carluer), il faut voir comment on peut continuer. Le marché monte en flèche, le Pogo S4 va forcément être plus demandé, les chantiers sont pleins, ce n’est pas simple. L’idée serait de lancer une construction pour la prochaine Transat Jacques Vabre. On va se réunir avec nos partenaires pour réfléchir à un plan de bataille.

 

“En 470, on rebat toutes les cartes”

 

► Tu as annoncé repartir sur une olympiade en 470 en vue de Paris 2024 avec Camille Lecointre, était-ce une évidence de remettre ça ?
Je suis sorti très déçu et frustré des Jeux de Tokyo, mais quand j’ai vu les filles rentrer de leur medal race aux Jeux avec la médaille, j’ai tout de suite compris que je n’avais qu’une envie, c’était d’y retourner et d’essayer d’aller décrocher cette médaille. Et les Jeux à la maison, c’est la chance d’une vie.

► Votre association était-elle déjà dans l’air avant Tokyo ?
On en parlait beaucoup, mais juste en rigolant, je ne savais pas ce qu’elle avait envie de faire après. Mais quand j’ai vu sa tête à la fin de sa medal race, clairement, elle avait la rage, on voyait qu’elle n’avait pas envie d’en rester là. Je l’ai appelée fin août, j’ai tout de suite compris qu’elle avait la même idée que moi en tête, elle avait déjà réfléchi à tout ! On va reprendre l’entraînement fin juin pour préparer le championnat du monde en octobre en Israël.

► Avez-vous déjà une idée de vos concurrents en France ?
Oui, Kevin (Peponnet) et Aloïse (Retornaz) [partenaires de Jérémie Mion et Camille Lecointre jusqu’à Tokyo, NDLR] repartent eux aussi, donc c’est clairement l’équipage qui va être le plus compétent en face de nous. Maintenant, le jeu est aussi de se concentrer sur la concurrence internationale, parce que si on repart, c’est pour viser une médaille et de la plus belle des couleurs, donc on va aussi essayer de regarder quels vont être nos adversaires dans les autres pays.

► Camille sera barreuse, toi équipier, est-ce la meilleure configuration dans cette nouvelle discipline du 470 mixte ?
Sur le papier, je pense que c’est la meilleure configuration. Maintenant, Kevin et Aloïse font le contraire et on se pose forcément les questions de savoir si une configuration va l’emporter sur l’autre, quelles conditions vont favoriser telle configuration plutôt que l’autre. Mais c’est aussi ça qui est sympa, on rebat toutes les cartes, on va peut-être découvrir de nouvelles façons de naviguer, des choix différents dans les voiles, on ne va pas s’ennuyer !

 

Photo : Jean-Marie Liot / Alea

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