Alex Thomson prendra le départ du Vendée Globe 2020

Vendée Globe : skippers remplaçants ou pas ?

L’avis de course du Vendée Globe donne la possibilité aux participants de bénéficier d’un skipper remplaçant en cas d’empêchement avant le départ (à désigner avant le 1er octobre), un cas d’autant plus envisagé cette année par certains teams que le Covid-19 menaceTip & Shaft a fait chauffer son téléphone pour interroger toutes les équipes sur leur choix d’avoir recours ou non à cette possibilité.

L’avenant 4 de l’avis de course précise les formalités administratives et médicales d’inscription du skipper remplaçant, qui doit en sus soumettre son CV nautique, charge à la direction de course de valider ou non la personne choisie. N’est en revanche plus exigée de qualification, comme nous le confirme le directeur de course Jacques Caraës : “II n’y a plus les 2 000 milles obligatoires comme par le passé, parce que les gars ne trouvaient jamais le temps de les faire.” En revanche, dans l’annexe Covid prochainement présentée aux skippers, il est précisé que les remplaçants devront se soumettre aux mêmes tests que les titulaires, mais aussi s’astreindre au même confinement de cinq jours la semaine précédant le départ. Ce qui, pour certains, a des conséquences.

14 SKIPPERS SUR 33 SANS REMPLAÇANTS

Sur les 33 skippers ou teams que Tip & Shaft a interrogés, 14 nous ont répondu ne pas prendre de remplaçant : Fabrice Amedeo, Romain Attanasio, Alexia Barrier, Arnaud Boissières, Didac Costa, Manu Cousin, Pip Hare, Ari Huusela, Stéphane Le Diraison, Thomas Ruyant, Damien Seguin, Kojiro Shiraishi, Sébastien Simon et Maxime Sorel. La raison la plus souvent avancée est l’histoire personnelle et la proximité du marin avec ses partenaires.

“Le lien qui unit Kojiro avec le CEO et tous les collaborateurs de DMG Mori est très fort et n’aurait pas pu être le même avec un autre skipper. Il faut aussi que le skipper parle japonais pour communiquer avec ses followers japonais”, explique ainsi le responsable presse de Kojiro Shiraishi, Shota Kanda. De son côté Manu Cousin justifie “un choix de longue date fait avec Eric Sétin, le directeur du groupe Sétin, c’est une histoire humaine entre lui et moi .

Même chose pour Maxime Sorel, mais aussi pour Damien Seguin : “J’ai posé la question à Apicil qui m’a répondu que si je ne partais pas, ils ne voyaient pas l’intérêt de faire partir le bateau.” Quant à Alexia Barrier, elle explique : “Je n’ai pas eu de demande de mes partenaires qui sont attachées à moi. Et la personne que j’aurais éventuellement voulue, Joan Mulloy, va bientôt avoir un bébé.”

D’autres avancent des raisons liées au risque, à l’instar de Fabrice Amedeo : “Je pensais un moment prendre Eric Péron, mais, vu que je suis armateur de mon bateau, je préfère, si j’ai un ennui dans la dernière ligne droite, que mon bateau ne parte pas et en assumer les conséquences vis-à-vis de mes partenaires, plutôt que de laisser le bateau partir avec quelqu’un qui pourrait potentiellement ne pas me le ramener.” Le cas est similaire pour Stéphane Le Diraison, également armateur de son Imoca : “Imagine qu’il arrive à mon remplaçant ce que j’ai vécu en 2016 (démâtage), ce qui équivaut à une perte sèche de 400 000 euros, je ne me vois pas gérer une telle dette générée par un autre skipper. Je veux bien prendre le risque en mon nom, mais je ne peux pas imaginer que quelqu’un puisse me le faire courir.”

Quant à Romain Attanasio, il a changé d’avis à cause de l’obligation faite aux skippers remplaçants de se confiner eux aussi cinq jours : J’avais pris Seb Marsset, mais j’avais besoin de lui sur le bateau pendant mon propre confinement. Je n’ai pas le budget pour prendre une personne en plus, donc j’ai décidé de m’en passer.”

Si la plupart des skippers ayant renoncé à prendre un remplaçant sont majoritairement sur des projets d’envergure budgétaire moyenne ou modeste, les postulants au podium que sont Thomas Ruyant et Sébastien Simon, ont eux aussi fait ce choix, quitte à prendre le risque de voir leur bateau neuf rester à quai. Marcus Hutchinson, team manager du premier, confie que le projet a été bâti autour de Thomas et c’est tellement peu probable qu’il ne puisse pas partir qu’on ne l’a pas envisagé. Après, s’il se cassait la jambe demain, on essaierait de trouver une solution.” De son côté, Sébastien Simon explique : “C’est une décision que nous avons prise avec mes partenaires, c’est une belle preuve de confiance, ils me font bien comprendre qu’ils m’accompagnent moi et pas un d’autre.” Le risque Covid ? “J’agirai de façon responsable pour ne pas l’attraper, j’ai bien conscience des enjeux”, répond le Sablais.

JOSSE, LUNVEN, MANUARD, MEILHAT, PRATT, JOURDAIN, LE ROUX, CAPE…
REMPLAÇANTS DES GROS TEAMS

S’il n’y aura a priori pas de remplaçant sur LinkedOut et Arkéa Paprec, la plupart des gros teams ont fait au contraire le choix d’en prendre un, au regard des sommes investies“Depuis le début, on savait que c’était une case à cocher, il faut faire preuve de responsabilité, estime ainsi Greg Evrard, team manager de Corum (Nicolas Troussel). Il se trouve qu’on a la chance au sein de notre équipe d’avoir Sébastien Josse, qui a pris trois départs du Vendée Globe, le choix s’est naturellement porté vers lui.”

Kevin Escoffier est sur la même longueur d’ondes : “Le Vendée Globe, c’est tous les quatre ans pour les skippers, mais aussi pour les sponsors, donc on est obligé de prévoir le coup. Pour nous, même s’il reste deux-trois choses à finaliser, c’est Nicolas Lunven, on a fait la Jacques Vabre ensemble, ça me paraissait évident.”

Quant à Armel Tripon, il explique : “C’était une demande de notre partenaire L’Occitane, ne pas être au départ aurait été préjudiciable pour le sponsor. Donc on a un skipper remplaçant, Sam Manuard, l’architecte du bateau.” Du côté d’Initiatives Cœur et de Sam Davies, le sujet n’a pas fait débat : “Il a été vite tranché, c’est Paul Meilhat. Notre projet est ambitieux, il a aussi une dimension autre que la dimension purement sportive, ce qui justifie de faire en sorte que le bateau aille à tout prix en mer”, justifie le team manager David Sineau. Alex Thomson a de son côté opté pour Andrew Cape, son équipe indiquant : “Andrew travaille avec Alex et le team depuis environ 15 ans, il a rempli le rôle de navigateur et de routeur récemment, ils ont aussi couru ensemble la Barcelona World Race en 2008.”

L’équipe de Jérémie Beyou n’a pas voulu communiquer sur le sujet, se réservant la primeur de l’annonce, mais il ne fait guère de doute que Christopher Pratt, aux côtés du skipper de Charal sur la Transat Jacques Vabre 2019, sera le remplaçant du vainqueur de la Vendée-Arctique. Chez Apivia, on nous a fait savoir que “le sujet n’est pas encore tranché”, d’après nos informations, Charlie Dalin aura un remplaçant, sans doute Yann Eliès, avec qui il a gagné cette même Transat Jacques Vabre, sauf si celui-ci est finalement retenu dans l’équipage du Maxi Edmond de Rothschild sur le Jules-Verne.

Les autres skippers sondés ayant des remplaçants sont Yannick Bestaven (qui a choisi Roland Jourdain), Miranda Merron (son compagnon et team manager Halvard Mabire), Clément Giraud (le propriétaire de son bateau Erik Nigon), Louis Burton, qui explique : “On n’a jamais traité la question de manière aussi approfondie que cette année pour une raison simple : le Covid. On a choisi Davy Beaudart, un bon marin, en qui j’ai toute confiance, il connaît déjà mes partenaires et le bateau.” Enfin, le team Banque Populaire a jeté son dévolu sur Erwan Le Roux pour suppléer, si besoin, Clarisse Crémer : “On a vraiment apprécié la collaboration avec lui en vue de la Transat AG2R avec Armel (Le Cléac’h) même si elle n’a pas eu lieu. Il fait toutes les navigations avec Clarisse depuis la remise à l’eau du bateau, c’est quelqu’un de doué à la tête bien faite, commente le directeur du team, Ronan Lucas (voir interview ci-dessous).

CERTAINS N’ONT PAS ENCORE TRANCHÉ

Si Boris Herrmann n’a pas souhaité répondre à la question – “On a des plans, mais ça reste en interne” -, tout comme Alain Gautier, team manager de MACSF (Isabelle Joschke), plusieurs skippers n’ont pas encore tranché la question de l’éventuel remplaçant. Certains parce qu’ils ont d’autres chats à fouetter : “On ne s’est pas posé la question, on va peut-être le faire”, nous a ainsi confié Jean Le Cam. Même chose pour Sébastien Destremau – “Je ne m’en suis pas occupé du tout, mais mes frères sont tout à fait en mesure de pouvoir me remplacer le cas échéant” – et Benjamin Dutreux : “Ce n’était pas le sujet prioritaire, il n’y a rien de défini, mais je pense qu’on va essayer de prévoir quelque chose.”

De leur côté, Giancarlo Pedote et Alan Roura hésitent encore : Le sujet est encore sur la table, on ne sait pas si on choisit quelqu’un ou pas, c’est une décision que je dois prendre en concertation avec les sponsors”, nous a répondu l’Italien. Du côté du Suisse, son équipe nous a fait savoir que “rien n’est définitivement fixé, le protocole sanitaire vient sérieusement compliquer la chose avec ce confinement obligatoire pour le remplaçant.” Et s’ils se décident finalement à en prendre un, les marins hésitants pourront toujours faire appel au remplaçant d’une autre équipe, ce qui est permis par le règlement… à condition que l’équipe en question accepte !

Photo : Lloyd Images

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